Sur le radar: Perspectives juridiques relatives aux véhicules autonomes

POINT DE VUE

Le transport autonome au temps de la COVID-19

À l’heure où la société et l’économie naviguent en eaux troubles en raison de la pandémie de COVID-19, la robotique et les moyens de transport autonomes mettent en lumière leur potentiel prometteur.

À court terme, la distanciation physique et les autres restrictions ont forcé la fermeture de quelques usines de fabrication automobile et robotisée, ce qui nuit au développement des véhicules connectés et autonomes (VCA). Or, à long terme, la pandémie pourrait en fait propulser le secteur, en ramenant à l’avant-scène le recours à la robotique et aux modes automatisés de prestation de services, ainsi que certains aspects liés aux infrastructures et à l’urbanisme. Même si la crise a obligé plusieurs entreprises de VCA à cesser leurs activités de développement et de mise à l’essai, les VCA sont en train de se tailler une place dans une communauté mondiale qui revoit ses priorités, modifie ses habitudes et cherche de plus en plus à réduire les interventions humaines au quotidien.

VCA en première ligne

Dans le domaine de la santé, par exemple, les robots s’avèrent utiles pour désinfecter les locaux, livrer du matériel médical et même pour surveiller l’état des patients ou leur faire subir des tests. À Wuhan, épicentre de la pandémie, les besoins urgents et les rues désertées ont permis à JD Logistics de déployer des véhicules autonomes pour livrer du matériel médical au neuvième hôpital de Wuhan. À l’hôpital mobile de Wuchang, des robots connectés à la 5G prennent la température des patients, désinfectent les installations, transportent les repas et les médicaments, dansent pour divertir les patients et permettent aux médecins de surveiller les signes vitaux à distance. Ce projet est le fruit de la collaboration entre la Chinese Academy of Sciences et le gouvernement du Hubei. En Floride, la clinique Mayo s’est associée à l’Autorité des transports de Jacksonville, Beep et NAVYA afin de mettre en place des navettes autonomes pour le transport des échantillons de test des sites de dépistage au volant jusqu’au laboratoire. En plus de couper un maillon humain de la chaîne de transmission potentielle du virus, le transport autonome permet d’affecter les travailleurs de la santé à des tâches plus utiles.

Logistique

Dans le commerce de détail, les véhicules autonomes, déjà bien intégrés dans la logistique du transport sur courte distance, deviennent plus attirants que jamais dans cette nouvelle dynamique de sécurité, de coûts et de responsabilité. Les robots de livraison autonomes de KiwiBot livrent du matériel sanitaire et des produits d’hygiène à Berkeley et à Denver depuis la mi-mars, et ils viennent d’entrer en service en Colombie. Neolix, une entreprise de Beijing, note une forte hausse des commandes pour ses véhicules de livraison autonomes en raison de la subvention du gouvernement chinois, qui rembourse jusqu’à 60 % du prix d’achat unitaire. L’entreprise a mobilisé l’équivalent de 29 millions de dollars en février et compte investir cette somme dans la production de masse de véhicules autonomes. À la mi-février, la Californie délivrait le deuxième permis de son histoire à Nuro, une jeune entreprise de livraison autonome, qui pourra mettre à l’essai ses véhicules sans conducteur R2 sur les voies publiques. Bien que le déploiement ait été mis sur la glace en raison du confinement imposé par l’État, Nuro a entrepris la planification logistique en vue de lancer, dès que possible, un service de livraison en bonne et due forme en partenariat avec les détaillants locaux. « Nous avons toujours cru au pouvoir transformateur des véhicules autonomes, qui est d’autant plus évident au temps de la COVID-19 », explique le chef des affaires juridiques et des politiques de Nuro.

Transport maritime

Du côté du transport maritime, l’utilisation de navires sans équipage est quelque peu freinée par les lois et règlements dépassés, qui sont mûrs pour une refonte dès la sortie de crise. Dans un contexte où les chaînes d’approvisionnement mondiales sont rompues et les navires constituent des terreaux fertiles pour la COVID-19, ce qui a entre autres entraîné la fermeture des ports, les navires sans équipage représentent une solution intéressante pour relancer le commerce international et rétablir les chaînes d’approvisionnement essentielles malgré la pandémie et la distanciation physique. La crise actuelle démontre à nouveau la nécessité bien réelle des navires sans équipage dans un écosystème commercial au maillage dense.

Véhicules aériens sans pilote (UAV) et confinement

En ces temps de pandémie, une autre application multimodale des VCA a fait son apparition dans le secteur de l’aviation. Un peu partout sur la planète (Royaume-Uni, Australie, France, Espagne, Malaisie, Émirats arabes unis, États-Unis et Chine), les corps policiers utilisent des drones pour faire respecter, avec rapidité et efficacité, les mesures de distanciation physique. En Espagne, les forces armées utilisent quant à eux des drones agricoles de DJI pour pulvériser du désinfectant. En Chine, des drones industriels sont convertis à d’autres usages et MicroMultiCopterAero Technology, une entreprise de Shenzhen, a déployé plus de 100 drones pour surveiller les foules et la circulation, repérer les récalcitrants qui ne portent pas de masque et, grâce à des capteurs thermiques, détecter les gens qui ont une température corporelle élevée. « L’épidémie du coronavirus nous a permis de mieux comprendre l’utilité des drones pour la société et le gouvernement. C’est un puissant catalyseur du développement et de la croissance rapide de notre entreprise », affirme le président de l’entreprise.

Économie à la demande

On assiste à un foisonnement des applications des VCA et de la robotique dans l’économie à la demande (messageries en général et livraison alimentaire en particulier). Il s’agit là d’un autre domaine concret où la révolution des VCA pourrait bientôt prendre forme. Avant le déferlement de la COVID-19, Refraction AI (une entreprise d’Ann Arbor, au Michigan) mettait à l’essai des véhicules autonomes pour la livraison de repas préparés par des restaurants du centre-ville. Ces VCA étaient essentiellement des robots dotés de roues et d’un fuselage pour le transport des sacs. Les notions d’« entreprise essentielle » et de « milieu de travail essentiel » étant très restreintes à l’ère de la distanciation physique, il ne serait pas étonnant que les VCA, qui promettent efficacité et économie, se retrouvent dans la mire d’entreprises appartenant à d’autres secteurs que la livraison alimentaire et les chaînes d’approvisionnement.

Pandémie de COVID-19 et progrès des VCA

Nous croyons donc que la COVID-19 pourrait représenter l’impulsion qui fera avancer les VCA dans divers secteurs, notamment lorsque les facteurs suivants deviendront réalité :

  1. Il y aura une meilleure compréhension du rôle, de l’utilité et de la polyvalence des VCA (particulièrement les véhicules autres que les automobiles) dans les infrastructures de transport essentielles et la logistique des chaînes d’approvisionnement.
  2. Il y aura une meilleure compréhension des infrastructures nécessaires à l’utilisation des VCA à diverses fins dans un contexte de distanciation physique (engendrée par une pandémie ou une autre cause sans précédent).
  3. Les gouvernements seront plus motivés à mettre à jour le cadre juridique et éliminer les entraves
  4. réglementaires, notamment en ce qui a trait aux assurances, à la gestion du risque (p. ex. responsabilité) et à la confidentialité.
  5. Des fonds seront alloués au développement des VCA, par le privé, le public ou en partenariat public-privé, en raison des occasions et des utilisations novatrices mises au jour par la pandémie de COVID-19.
La formation et l’éducation sur l’utilisation efficace et sécuritaire des VCA seront rendues prioritaires et accessibles.

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