une main qui tient une guitare

Perspectives

Obligations et droits en matière de signalement d’incidents maritimes à Transports Canada

Le présent article donne des indications générales sur les droits et obligations concernant le signalement d’un sinistre maritime à Transports Canada et la réponse à une demande d’inspection à bord formulée par Transports Canada. Le lecteur doit garder à l’esprit que chaque cas est un cas d’espèce et que la mesure dans laquelle les considérations ci-dessous peuvent trouver application dépend du contexte.

Exigences en matière de signalement aux autorités gouvernementales

La Loi sur la marine marchande du Canada1 (la LMMC) s’applique à tout bâtiment canadien où qu’il se trouve, et à tout bâtiment étranger présent dans les eaux canadiennes2, à l’exception des bâtiments militaires3. Lorsqu’un bâtiment, qu’il fasse route par ses propres moyens ou qu’il soit remorqué, est impliqué dans un sinistre maritime ou un autre événement dangereux, le capitaine ou tout autre membre de l’équipage, l’exploitant, le pilote ou toute personne responsable du bâtiment doit en faire rapport sans délai4. Ce rapport doit être communiqué par radio à une station de radiocommunications maritime canadienne5.

Le rapport préliminaire doit contenir les éléments suivants :

  • l’identité du navire d’où émane le rapport;
  • la nature de l’incident;
  • l’identité du ou des navires impliqués dans l’incident;
  • la date et l’heure de l’incident;
  • le lieu de l’incident;
  • le nombre de victimes;
  • si un pilote était présent à bord du navire impliqué dans l’incident;
  • si l’incident risque de causer un obstacle à la navigation ou tout autre grave danger, ou la pollution des eaux6.

Signalement d’un accident maritime, d’un sinistre maritime ou d’un événement dangereux

Lorsqu’un navire est impliqué dans un accident7, un sinistre maritime8, ou un événement dangereux9, le capitaine, un officier breveté, l’exploitant, un membre de l’équipage, le pilote ou toute personne responsable du navire ou du bâtiment remorqué doit en faire un rapport préliminaire sans délai.

Le rapport préliminaire doit être suivi, dans un délai de 24 heures, ou aussitôt que possible, d’un rapport écrit comprenant une description de ses causes probables, adressé sous la forme du formulaire 1(W.R)/2(A.R) au chef des Enquêtes sur les accidents maritimes, ministère des Transports, à Ottawa10.

Signalement d’un abordage

En cas d’abordage, le capitaine ou la personne ayant la direction de chaque bâtiment doit, dans la mesure où il peut le faire sans danger pour son propre bâtiment, son équipage et ses passagers, prêter à l’autre bâtiment l’assistance nécessaire pour les sauver de tout danger causé par l’abordage, et rester auprès de l’autre bâtiment jusqu’à ce qu’il se soit assuré que celui-ci n’a plus besoin d’assistance11. Une fois la situation jugée sécuritaire pour tous les bâtiments concernés, les capitaines ou les personnes responsables des bâtiments doivent s’échanger leurs noms et adresses, ou fournir les noms et adresses des représentants autorisés des bâtiments12.

Signalement d’un rejet de polluant ou d’un risque de rejet de polluant

Si un bâtiment canadien se trouvant n’importe où dans le monde ou un bâtiment non canadien se trouvant dans les eaux canadiennes subit un incident impliquant ou risquant d’impliquer la perte de marchandises dangereuses (matières dangereuses) par-dessus bord en mer, un incident polluant ou risquant de polluer un milieu marin ou un incident de pollution accidentelle par hydrocarbures durant le chargement ou le déchargement d’un navire à une installation de manutention des hydrocarbures, le capitaine ou la personne responsable du navire doit, aussitôt que possible, présenter un compte rendu à un inspecteur de la sécurité maritime ou à son équivalent au niveau local13. Chaque fois qu’il y a de nouveaux renseignements qui se rapportent à l’incident et qui sont essentiels à la protection du milieu marin, un compte rendu supplémentaire doit être transmis14.

Sanctions pour non-communication d’un rapport ou compte rendu

Les pénalités imposées pour non-communication d’éléments obligatoires sont lourdes. Le fait de ne pas communiquer un rapport d’accident, d’événement dangereux, de sinistre maritime ou d’abordage est passible d’une amende maximale de 1 million de dollars et d’un emprisonnement maximal de 18 mois, ou de l’une de ces peines15.

Les enquêtes de l’inspecteur de la sécurité maritime et vos droits et obligations

Pouvoirs de l’inspecteur de la sécurité maritime 

Pour garantir le respect des dispositions de la LMMC, l’inspecteur de la sécurité maritime ou autre personne autorisée a le pouvoir d’ordonner au capitaine d’un bâtiment d’immobiliser celui-ci, ou de se diriger vers le lieu qu’il précise, de s’amarrer à quai, de mouiller ou de rester à cet endroit pour la période raisonnable qu’il précise16. En outre, l’inspecteur peut monter à bord de tout bâtiment, en inspecter toute partie et pénétrer dans tout local sans mandat et à toute heure convenable, à l’exception des locaux d’habitation17. Les locaux d’habitation ne peuvent être visités que si l’inspecteur est muni d’un mandat, ou avec le consentement de l’occupant18. L’inspecteur ne peut recourir à la force que s’il est accompagné d’un agent de la paix et si le recours à la force est autorisé dans un mandat19.

Mandats de l’inspecteur

Un mandat peut être obtenu d’un juge de paix si celui-ci est convaincu que la visite est nécessaire, lorsqu’un refus a été opposé à la visite ou qu’il y a des motifs raisonnables de croire que tel sera le cas20.

Obligation de répondre aux questions et d’arrêter les machines

Dans l’accomplissement d’une inspection, l’inspecteur de la sécurité maritime peut ordonner à quiconque de lui donner les renseignements qu’il peut valablement exiger, de lui prêter toute l’assistance possible, de mettre des machines en marche ou de faire fonctionner de l’équipement ou d’arrêter les machines ou de cesser de faire fonctionner l’équipement21. Le capitaine est tenu de rassembler l’équipage pour qu’il réponde aux questions ou de mettre en œuvre les procédures en matière d’urgence et de sécurité requises par les règlements2.

L’inspecteur peut ordonner au capitaine d’interdire ou de limiter l’accès à une partie du bâtiment

L’inspecteur peut, dans le cadre de son inspection, empêcher l’accès à une partie ou à toutes les parties du bâtiment pendant la période qu’il précise23.

L’inspecteur peut de manière générale demander et saisir toute preuve matérielle pertinente

L’inspecteur peut ordonner à quiconque se trouvant sur les lieux de son intervention de lui remettre tout document qu’il est tenu d’avoir en sa possession aux termes d’une disposition visée24. L’inspecteur peut aussi procéder à des prélèvements de substances, prendre connaissance de données, et emporter tout document ou équipement, pour analyse, mais il doit faire des copies des documents le cas échéant25. Les documents originaux et autres objets doivent être restitués dans les meilleurs délais dès qu’ils ne sont plus nécessaires26, et l’organisation doit disposer des échantillons de la façon qu’elle estime indiquée27.

Droit à l’assistance d’un avocat

Le représentant autorisé ou tout employé ou passager dont la conduite fait l’objet, aux termes de la Loi sur les enquêtes, d’une enquête d’un représentant de l’État ou d’une enquête en lien avec un décès survenu à bord a le droit d’être représenté par un avocat28. L’inspecteur doit différer l’enquête dans la mesure nécessaire pour permettre une constitution d’avocat.

La coopération est la meilleure ligne de conduite

Les inspecteurs de la sécurité maritime sont nommés pour enquêter, mais ils ne sont pas des agents de police. Ils tentent simplement de découvrir les causes des incidents maritimes et seront sans doute mieux disposés envers une entreprise ou un capitaine et son équipage s’ils se montrent coopératifs durant une enquête. Puisque les pénalités pour négligence dans les incidents maritimes sont flexibles plutôt que fixées d’une manière absolue, l’enquêteur pourra se montrer magnanime et adoucir les pénalités. C’est pourquoi un minimum de coopération est généralement à conseiller.

Comme les motifs à l’origine de l’inspection ne sont pas forcément toujours clairs, les armateurs et leurs représentants devraient s’abstenir d’en dire trop et s’en tenir plutôt à l’essentiel.

Décès à bord

Lorsqu’un décès se produit à bord d’un bâtiment relevant de la compétence du Canada, une enquête peut être tenue afin de déterminer la cause du décès, aux termes de la Loi sur les enquêtes29.

Si vous avez des questions concernant la Loi sur la marine marchande du Canada, ou si vous souhaitez obtenir des conseils portant sur un cas particulier, prière de communiquer avec le groupe Transport maritime de BLG à l’adresse suivante : [email protected].


1  Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada, LC 2001, c 26 [LMMC].

2 LMMC, art. 8.

3 LMMC, par. 7(1).

4 Règlement sur les rapports de sinistres maritimes, DORS 85-514, art. 4 [RRSM]

5 RRSM, al. 4(2)a).

6 RRSM, par. 4(4)

7 Le terme « accident » est défini ainsi : « Est assimilé à un accident, tout accident à bord d’un navire à la suite duquel une ou plusieurs personnes, selon le cas a) perdent la vie; b) sont portées manquantes après être supposément tombées par-dessus bord, c) subissent des blessures corporelles dont la gravité les empêche de reprendre leurs fonctions normales dans les 24 heures après réception de soins médicaux; d) subissent une asphyxie temporaire; e) subissent une électrocution entraînant un évanouissement temporaire ». (RRSM, art. 2).

8 Le terme « sinistre maritime » est ainsi défini dans la LMMC : « sinistre maritime s’entend de tout accident ou incident lié à un bâtiment. Y est assimilée toute situation dont le ministre a des motifs raisonnables de croire qu’elle pourrait, à défaut de mesure corrective, provoquer un tel accident ou incident ». SCRR, art. 2 et LMMC, par. 219(3)).

9 Le terme « événement dangereux » est ainsi défini : « Est assimilé à un événement dangereux tout incident qui occasionne a) soit la rupture ou le mauvais fonctionnement de toute pièce d’un gréement, d’une structure ou d’une machine se trouvant à bord d’un navire ou lui appartenant, susceptible de causer des blessures graves ou la perte de vies; b) soit une situation qui aurait pu provoquer un sinistre ou un accident. » RRSM, art. 2).

10 RRSM, art. 5.

11 LMMC, al. 148a)

12 LMMC, al. 148b)

13 Règlement sur la pollution par les bâtiments et sur les produits chimiques dangereux, DORS/2012-69 (RPBPCD), art. 132.

14 RPBPCD, par. 132(8).

15 LMMC, art. 37, 78, 101, 121, 137, 151, 183, 191, 208, 228 et 245.

16 LMMC, par. 211(3)

17 LMMC, par. 211(1)

18 LMMC, par. 211(2)

19 LMMC, par. 211(2.2)

20 LMMC, par. 211(2.1)

21 LMMC, al. 211(4)a)

22 LMMC, al. 211(4)d)

23 LMMC, al. 211(4)b)

24 LMMC, al. 211(4)e)

25 LMMC, al. 211(4)g) à k)

26 LMMC, par. 211(5)

27 LMMC, par. 211(6)

28 Loi sur les enquêtes, art. 12 et Charte canadienne des droits et libertés, al. 10b)

29 LMMC, art. 149.

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