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Perspectives

Cours 101 : notre revue du projet de loi 96 sur la langue française

Le gouvernement caquiste annonce en grande pompe son projet de modifier la Charte de la langue française depuis déjà quelques mois. Le 13 mai 2021, le ministre responsable de la langue française, Simon Jolin-Barette, a mis fin au suspense en déposant à l’Assemblée nationale sa réforme de la Loi 101, le projet de loi 96, créant beaucoup d’émois et de réactions dans la province. Ce projet de loi s’intitule la Loi sur la langue officielle et langue commune. La révélation de cette nouvelle mouture de la Charte, qui élargit la place du français dans la province, se fera inévitablement ressentir dans le milieu des affaires et du travail.

Le projet de loi propose, entre autres, l’imposition de nouvelles obligations en matière de langue du travail, des affaires, des contrats, de l’affichage, des communications entre l’État, les entreprises et les institutions d’enseignement supérieur (particulièrement les cégeps). Elle prévoit aussi instaurer un ministère du Français, un poste de commissaire à la langue française ainsi qu’une unité administrative, connue sous le nom de Francisation Québec, dont les fonctions seront notamment d’offrir des services d’apprentissage du français aux entreprises.

Les modifications suggérées dans le projet de loi suggèrent notamment que le bilinguisme institutionnel cédera sa place à l’unilinguisme francophone en ce qui a trait aux communications entre l’État et les entreprises, et entre les ordres professionnels et leurs membres. Pour avoir le résultat désiré, le projet de loi vise à modifier une série d’autres lois et règlements du Québec, quoiqu’à un moindre degré par rapport aux modifications proposées à la Charte. Ces changements incluent deux dispositions additionnelles à la Loi constitutionnelle de 1867 ayant trait au statut de la nation québécoise.

Voici quelques points saillants de la plus importante réforme linguistique depuis l’adoption même de la Charte de la langue française en 1977 :

Travail

  • Les entreprises de compétence fédérale, telles que les banques, les aéroports, et les entreprises de transport routier et maritime, devront se conformer aux dispositions de la Charte, y compris les dispositions portant sur la francisation.
  • Les entreprises de 25 à 49 employés seront dorénavant assujetties aux mêmes règles que les entreprises de 50 à 99 employés en matière de francisation. Celles-ci devront généraliser l’utilisation du français à tous les niveaux de leur entreprise.
  • Dorénavant, les entreprises employant entre 25 et 100 personnes devront aussi instituer un comité de francisation si l’Office québécois de la langue française le leur ordonne.
  • Également, l’Office pourra imposer aux entreprises qui emploient au moins 5 personnes des services d’apprentissage du français.
  • L’exigence de la connaissance d’une autre langue que le français à l’embauche, pour obtenir une promotion, ou maintenir un poste, sera encadrée de manière plus stricte.

Affaires

Administration

  • Tous les contrats conclus par l’Administration devront être rédigés exclusivement en français. Le projet de loi vient identifier certains cas où une version rédigée dans une autre langue peut être jointe à la version française (notamment, dans certaines ententes autochtones, ententes intergouvernementales ou internationales, etc.). Des contrats conclus par l’Administration pourront être rédigés exclusivement dans une langue autre que le français dans des circonstances prescrites et limitées.
  • De plus, toute communication entre une entreprise et l’Administration relativement à un permis, une subvention ou une autre autorisation ou aide financière de même nature devra dorénavant se faire exclusivement en français, à quelques exceptions près.
  • Toute entreprise offrant des services à l’Administration qui sont destinés au public sera également assujettie aux dispositions de la loi relativement à l’Administration.

Conduite des affaires

  • Le projet de loi vient renforcer l’obligation des entreprises offrant des biens et des services aux consommateurs de respecter le droit de ces derniers d’être servis en français. Quant aux entreprises offrant des biens et des services à un public autre que des consommateurs, il leur incombera aussi d’informer et de servir tel public en français par défaut.
  • Désormais, toute entreprise usant de contrats d’adhésion ou de contrats contenant des clauses types dans leurs relations avec des clients et des fournisseurs devra s’assurer de fournir à ces derniers la version française de tels documents avant qu’ils ne puissent exprimer leur volonté d’être liés par des versions rédigées dans une autre langue. Cette exigence s’étend également à tout document se rattachant à de tels contrats, mais on y exclut les contrats de travail.
  • Quant aux transactions immobilières, les contrats de vente ou d’échange d’une partie ou de l’ensemble d’immeubles résidentiels de moins de 5 logements, ainsi que certains autres documents afférents à la vente d’immobilier devront être rédigés en français, à moins que les parties fassent part de leur volonté expresse de les rédiger dans une autre langue.

Affichage

  • Quant à l’affichage public et la publicité des commerces, on permet toujours l’utilisation d’une marque de commerce rédigée uniquement dans une autre langue que le français lorsqu’aucune version française de cette marque ne se trouve au registre canadien et lorsqu’on ajoute un générique, descriptif ou slogan en français. Cependant, le français doit figurer de manière nettement prédominante dans l’affichage extérieur.
  • De plus, le français devra figurer de manière nettement prédominante dans l’affichage extérieur par rapport à des expressions tirées d’une autre langue qui figurent dans le nom d’une entreprise.

Sanctions

Sanctions civiles

  • Les dispositions d’un contrat, d’une décision ou d’un autre acte qui contreviennent à la Charte pourront être frappées de nullité ou voir leurs obligations réduites, à la demande la personne ayant subit le préjudice. Toutefois, si un organisme de l’Administration est parti à l’acte, la nullité sera absolue même sans préjudice.
  • Le Tribunal, saisi d’une demande d’imposition de sanction, pourra rendre toute ordonnance qu’il estime appropriée.
  • Dans un contrat de consommation ou d’adhésion, la clause rédigée qui n’est pas en français sera réputée incompréhensible, à moins que le contrat n’ait été rédigé dans cette autre langue à la demande expresse de l’adhérent.

Sanction administrative

  • Le ministre pourra suspendre ou révoquer un permis ou une autorisation en cas de non-respect de la Charte.

Sanctions pénales

  • Les amendes pour contravention à la Charte s’élèveront à une somme entre 700 $ et 7 000 $ pour les personnes physiques et entre 3 000 $ et 30 000 $ dans les autres cas. Ces montants seront doublés pour une première récidive et triplés pour toute récidive additionnelle. Les amendes s’imposeront pour chaque jour où l’infraction se poursuit. De plus, les administrateurs et les dirigeants d’une entreprise verront leurs amendes doublées.

Entrée en vigueur

  • L’entrée en vigueur des modifications proposées dans le projet de loi sera graduelle et s’étendra pour une période allant jusqu’à 3 ans de sa sanction. Il est donc important de se renseigner par rapport à sa situation particulière pour déterminer le délai accordé pour être conforme aux nouvelles dispositions de la Charte.

Ne manquez pas de lire nos prochains bulletins qui aborderont en plus de détail certaines modifications proposées dans le projet de loi. Entre temps, si vous souhaitez en savoir davantage sur le projet de loi et les impacts qu’ils pourraient avoir sur votre entreprise, n’hésitez pas à communiquer avec l’un des membres de l’équipe BLG. 

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