une main qui tient une guitare

Perspectives

Mentalité, motivation et objectif Lune

Transformez votre pratique du droit (et votre vie) en ces temps difficiles
grâce aux conseils d’Ozioma Egwuonwu

S’il y a une compétence à avoir de nos jours, c’est la capacité à se réinventer ‒ et nous en sommes tout à fait capables! Pas une seule fois et dans notre coin, mais continuellement et ensemble.

C’est le message que veut nous faire passer la conférencière et stratège de renommée internationale Ozioma Egwuonwu dans le cadre de cette série de trois séances conçue pour aider les professionnels et professionnelles du droit à transformer leur vie, leur carrière et leur organisation au moyen du concept qui l’a fait connaître : « Repenser son avenir ».

Les séances de mai 2021 étaient les dernières conférences données par BLG dans le cadre de sa Série sur le professionnalisme, qui visait à aider les clients, les collectivités et le pays dans son ensemble à se préparer pour la prochaine étape. Au total, nous avons frôlé les 1 700 participants et chaque séance donnait droit à une heure de professionnalisme au titre de la FPC exigée par le Barreau de l’Ontario.

N’hésitez pas à consulter le présent résumé de l’événement pour savoir en quoi consistent les quatre M : mentalités, motivations, modèles et méthodes, dont vous avez besoin pour votre « alunissage », c’est-à-dire atteindre l’objectif ambitieux que vous vous êtes fixé sur le plan personnel ou professionnel. Vous découvrirez les réponses de vos collègues aux sondages interactifs proposés lors de chaque séance aux sections « Ce que révèlent les sondages... ». Quant aux sections « Exercice », vous y trouverez des questions auxquelles vous devrez répondre pour vous aider à réinventer votre propre avenir.

Que vous réserve l’avenir?

Selon PwC, les percées technologiques, les virages démographiques, l’urbanisation galopante, la redistribution du pouvoir économique, l’appauvrissement des ressources et les changements climatiques sont les grandes tendances qui influent sur notre quotidien. La pandémie mondiale a bouleversé nos façons de travailler et a eu d’importantes répercussions sur les avocats et avocates. Dans le milieu des affaires, il y a une tension constante entre quatre mondes distincts : le monde rouge (où la quête de la prochaine avancée attrayante pour le consommateur stimule l’innovation et la spécialisation), le monde bleu (où le capitalisme dominé par les grandes entreprises fait loi), le monde jaune (où plus c’est petit, mieux c’est, et où l’humain prévaut) et le monde vert (où la responsabilité sociale et la confiance orientent les plans des entreprises).

Les changements surviennent à un rythme exponentiel.

Selon Ozioma Egwuonwu, « la multiplication des transformations à un rythme effréné est source de chaos. Mais c’est également à ce moment-là qu’on entre dans un état d’émerveillement. Nous devons nous habituer à sortir de notre « zone de confort ». Tout commence par se considérer comme un agent du changement. »

Ce que révèlent les sondages…

Près de la moitié des participants et participantes pensent que la profession juridique se dirige vers un monde rouge. C’est également le monde dans lequel 38 % des répondants et répondantes disent préférer vivre et travailler, le reste des participants se répartissant entre les mondes bleu et jaune (25 % chacun) et le monde vert (13 %).

Mentalités

Les mentalités, ou états d’esprit, influencent nos attitudes, notre comportement et nos résultats. Selon la chercheuse Carol Dweck, les personnes dont l’état d’esprit ne change pas (état d’esprit « immuable ») pensent qu’on naît avec un ensemble de capacités déterminées, de telle sorte qu’elles sont portées à croire qu’elles doivent faire leurs preuves. Elles évitent les défis, craignent l’échec et prennent personnellement toute rétroaction. Les personnes dotées d’un état d’esprit axé sur le développement, quant à elles, sont convaincues qu’elles ont un potentiel à réaliser, ce qui les pousse à miser sur l’apprentissage. Elles accueillent les défis, ne craignent pas l’échec et considèrent la rétroaction comme une occasion d’évoluer.

Mais il existe un troisième état d’esprit, selon Mme Egwuonwu.

En s’ouvrant à la transformation, on crée des occasions de se réinventer. Face au chaos, un état d’esprit axé sur la transformation ne se contente pas de changements progressifs, mais transforme les systèmes et les structures pour son compte et celui de ses clients, de son cabinet et de sa famille.

Pour réinventer son état d’esprit, Mme Egwuonwu recommande quatre stratégies. Tout d’abord, il s’agit de modifier la façon dont on voit le monde, y compris le langage que l’on utilise. Ensuite, il faut inclure à son quotidien des pratiques de soutien. Puis, il convient de s’efforcer d’établir des liens avec les autres qui nous donnent de l’énergie. Enfin, il est nécessaire de faire un « état des lieux » pour déterminer ce qui nous empêche d’avancer.

Ce que révèlent les sondages...

Un peu plus de la moitié (51 %) des participants et participantes ont affirmé envisager l’avenir avec un état d’esprit axé sur le développement, tandis que 48 % ont indiqué posséder un état d’esprit mixte et 1 % un état d’esprit immuable.

Exercice : Changez votre mentalité

Quel état d’esprit aimeriez-vous avoir dans votre vie personnelle et au travail? (Découvrez celui que vous adoptez actuellement en remplissant ce questionnaire de l’American Bar Association).

À quoi ressemblerait votre monde et comment vous sentiriez-vous si vous embrassiez pleinement cet état d’esprit?

Quelles pratiques optimales vous aideront à adopter l’état d’esprit désiré?

Quelle relation pouvez-vous créer avec vous-même et les autres pour entretenir cet état d’esprit?

À quelles réalités actuelles de votre pratique et de votre vie personnelle devez-vous vous confronter pour progresser?

Motivation

La motivation est ce qui nous pousse à avancer, selon Mme Egwuonwu.

La motivation intrinsèque vient de l’intérieur. Nous sommes intrinsèquement motivés lorsque nous trouvons quelque chose intéressant, agréable et conforme à nos valeurs; ce sentiment favorise l’autonomie, la maîtrise, la détermination et l’innovation. Quant à la motivation extrinsèque, elle concerne les récompenses et les punitions provenant de l’extérieur; elle peut être cause de stress, de désengagement et d’épuisement.

Le mot japonais « ikigai », que l’on pourrait traduire par « raison d’être » est à l’intersection de ce dans quoi vous excellez, de ce que vous aimez faire, de ce qui peut être rémunéré et de ce dont le monde a besoin. En trouvant votre « ikigai », vous trouverez un sens et obtiendrez une sécurité financière, affirme Mme Egwuonwu.

Ozioma Egwuonwu graphic

Image fournie par Ozioma Egwuonwu, (en anglais)

Ce que révèlent les sondages...

Lorsque l’on a demandé aux participants et participantes d’indiquer la clé de leur motivation dans leur carrière, 53 % ont répondu « motivation intrinsèque » et 47 % « motivation extrinsèque ». Lorsqu’on leur a demandé comment ils et elles se sentaient actuellement, la plupart se sont placés dans la partie inférieure du diagramme ikigai, particulièrement à l’intersection de la profession et de la vocation (« À l’aise mais sentiment de vacuité »).

Exercice : Trouver un sens

Où vous situez-vous sur le diagramme ikigai? Où voudriez-vous être? Que pouvez-vous faire pour y parvenir?

Qu’est-ce qui vous motive à avancer?

Modèles

Les modèles que nous utilisons au quotidien sont la clé de notre transformation.

Il peut s’agir de personnes ‒ des individus qui façonnent notre compréhension et appuient (ou entravent) notre progression.

Ces modèles peuvent être mentaux, ce que Peter Senge décrit comme des valeurs, des croyances, des suppositions et des raccourcis qui, souvent,limitent de manière inconsciente à ce qui nous est familier nos façons de penser et d’agir. Mme Egwuonwu compare les modèles mentaux à une carte du monde. Selon elle, « nous devons comparer le monde dans lequel nous voulons vivre à la carte que nous avons esquissée dans notre esprit ».

Les modèles peuvent également être des approches.

La manière dont nous choisissons d’apprendre, par exemple, peut influencer nos résultats. Richard Elmore, de l’Université Harvard, dégage quatre styles d’apprentissage : l’apprentissage hiérarchique se fait selon une approche descendante; l’apprentissage décentralisé repose sur les choix personnels; l’apprentissage individuel se fait dans son coin et l’apprentissage collectif a lieu en groupe. « Le contenu se trouve partout, selon Mme Egwuonwu. Les réseaux font office de nouvelles salles de classe. Observez les gens autour de vous afin de vous inspirer sur le chemin de la réinvention. » 

L’enquête appréciative, proposée par David Cooperrider, offre une autre perspective sur l’apprentissage. Plutôt que d’explorer ce qui ne va pas et de repérer les problèmes, l’enquête appréciative vise à s’intéresser à ce qui fonctionne et à déterminer comment l’amplifier. « Dans chaque système humain, il y a quelque chose qui fonctionne, affirme Mme Egwuonwu. On trouve davantage que ce que l’on cherche, qu’il s’agisse de lacunes ou de forces. »

Ce que révèlent les sondages...

Pour ce qui est des modèles d’apprentissage, les participants et participantes penchent largement en faveur du choix personnel : 36 % ont plébiscité le mode individuel décentralisé et 32 % ont plutôt opté pour le mode collectif décentralisé. Seuls 12 % ont préféré le mode hiérarchique individuel. Lorsqu’on leur a demandé ce sur quoi ils et elles se concentraient la plupart du temps, 84 % ont répondu sur ce qui ne fonctionne pas et 16 % sur ce qui fonctionne.

Exercice : Explorer ses modèles

Quels sont les modèles mentaux que vous vous appliquez à vous-même, à votre travail et au reste du monde? Comment envisagez-vous les possibilités? la collaboration? le plaisir? le changement? votre pratique? l’avenir?

Quel est votre style d’apprentissage préféré? Appuie-t-il votre transformation?

Qu’est-ce qui fonctionne actuellement pour vous? Comment le favoriser?

Méthodes

Les théories préparent le terrain en vue du changement, mais pour opérer une transformation, il faut se doter de nouveaux outils.

Mme Egwuonwu recommande sept méthodes :

La fenêtre de Johari. Pour changer, il convient tout d’abord d’avoir conscience de soi. La fenêtre de Johari est un exercice qui nous permet de nous comprendre nous-mêmes au moyen de quatre « carreaux » : ce que nous savons et montrons, ce nous savons et cachons, ce que les autres savent et que nous ne voyons pas et ce que personne ne sait. On peut prendre consciemment la décision de dévoiler certains aspects de notre personne et demander aux membres de notre famille, à nos amis et à nos collègues quels sont nos angles morts. « La conscience de soi est une source intarissable de bienfaits, affirme Mme Egwuonwu. Plus on en apprend sur soi-même, plus on arrive à progresser. »

L’expertise adaptative. L’expertise est à cheval sur deux continuums : l’efficience et l’innovation. Les « spécialistes de la routine » sont très efficaces dans les tâches qu’ils et elles connaissent bien, mais se retrouvent démuni·es devant la nouveauté. Les « spécialistes de l’adaptation », en revanche, sont capables d’appliquer leurs connaissances à de nouveaux contextes de façon à faire preuve d’efficience et d’innovation. « Exceller dans les tâches routinières a ses limites, fait remarquer Mme Egwuonwu. Il nous faut croire en nos capacités d’adaptation et de collaboration pour trouver de nouvelles solutions. »

Le modèle Cynefin. Cette méthode, à prononcer « cunévine », aide les leaders à repérer les meilleures façons d’aborder une situation en fonction du contexte : ce dernier peut être clair (appliquer les pratiques optimales), compliqué (appliquer de bonnes pratiques), complexe (user de nouvelles approches), chaotique (user d’approches novatrices) ou confus (tout est possible). Pour gagner du temps et limiter le stress, il conviendra de déterminer le contexte en jeu avant de choisir les outils et les ressources nécessaires.

La collaboration. La plupart du temps, il est primordial de s’appuyer sur la collaboration pour relever des défis, explique Mme Egwuonwu. Toutefois, il ne faut pas collaborer n’importe comment. Cherchez à instaurer une communication de qualité et misez sur la coopération (« passez de l’ego-système à l’écosystème »), les liens (« prêtez attention aux personnes en périphérie ») et l’engagement.

La réflexion conceptuelle. Cette manière d’aborder les défis et les occasions repose à la fois sur l’empathie à l’égard de votre situation, la créativité pour trouver des solutions de rechange et la rationalité pour s’assurer que la solution choisie correspond au contexte particulier dans lequel on se trouve. Cet article du Harvard Business Review résume bien le concept.

La concentration. Parmi les outils à votre disposition pour aiguiser votre concentration, vous pouvez utiliser la méthode « Getting things done », la technique Pomodoro ainsi que les applications Todoist, Asana et Trello; mais au-delà des techniques et applications, il importe de s’engager personnellement à atteindre l’objectif fixé. Chaque début de semaine, Mme Egwuonwu dresse une « liste d’efforts » dans laquelle elle indique un objectif (le but sur lequel elle se concentrera) pour chaque jour et son rôle (laquelle de ses multiples facettes elle utilisera pour y parvenir). Par exemple, une de ses connaissances déteste écrire mais adore cuisiner. Si son objectif du lundi consiste à finir un chapitre de son livre, elle fait appel à sa facette de « cheffe cuisinière », qui l’aide à se concentrer et rend la tâche plus agréable.

Le flow, ou « l’expérience optimale », concept popularisé par le psychologue positif Mihaly CsikszentmihalyiIl s’agit de moments où l’on se trouve entièrement captivé·e par une tâche stimulante ou agréable. Cet état mental accroît notre capacité à éprouver de la joie et un sentiment d’accomplissement

Pour y parvenir, il faut supprimer toute distraction, intérieure comme extérieure, travailler au moment optimal pour soi d’un point de vue biologique, s’atteler à une tâche en particulier suffisamment stimulante, se fixer un objectif, utiliser la caféine de manière stratégique, bien s’hydrater et créer une liste de lecture axée sur le flow.

Ce que révèlent les sondages…

Mme Egwuonwu a demandé aux participants et participantes d’évaluer leur capacité à gérer la complexité. Si 60 % ont répondu qu’ils et elles « s’en sortaient correctement », un tiers a affirmé être des « spécialistes de la gestion de la complexité » et 8 % ont avoué trouver la complexité difficile à gérer.

Exercice : De quels outils disposez-vous?

Quelles méthodes peuvent vous aider à atteindre votre objectif?

Objectif Lune

Nous voulons viser la Lune, mais la peur nous en empêche.

« On nous dit qu’en tant que professionnels et professionnelles à haut rendement, nous devons atteindre la perfection en tout temps, explique Mme Egwuonwu. Si nous admettons ne pas savoir quelque chose, nous avons peur de perdre notre statut ainsi que le respect et les éloges que nous recevons ‒ tous nos facteurs externes de motivation, en somme. Cette peur nous pousse à réinventer des résultats dont personne ne veut, nous y compris. »

Pour atteindre la Lune, c’est-à-dire notre objectif ambitieux et audacieux, nous devons remplacer notre état d’esprit immuable par un état d’esprit axé sur le développement, passer d’une motivation extrinsèque à une motivation intrinsèque, de modèles qui maintiennent le statu quo à des modèles qui favorisent la transformation, tout en utilisant des méthodes qui nous aident à atteindre la pleine conscience de soi et une expertise adaptative.

« Ce processus transformatif ne s’appuie pas sur une boule de cristal, mais sur une boussole, met en garde Mme Egwuonwu. Il s’agit d’un processus de métamorphose et non pas d’une transformation ponctuelle. Il y a toujours un nouveau défi à relever. »

N’oubliez pas de faire appel à toutes les ressources à votre disposition pour atteindre l’objectif ambitieux que vous vous êtes fixé, y compris les personnes qui peuvent vous appuyer et collaborer à vos efforts, et de célébrer votre « alunissage ». Si l’on ne marque pas la fin d’un cycle de réinvention, selon Mme Egwuonwu, notre cerveau n’enregistre pas que quelque chose a changé.

Elle a terminé en invitant les participants et participantes à conclure un contrat avec soi. En voici un exemple :

« Je m’engage à redéfinir mon avenir en transformant _________, _________ et ________ dans ma vie professionnelle/personnelle, ce qui signifie m’ouvrir à ______________ et tirer un trait sur _____________. L’expérience que je cherche à créer dans ma vie et dans le monde est remplie de _____________. Alors que les changements désirés commencent à s’opérer, _____________, _____________ et ____________ changeront également. Dans ___ (jours/semaines/mois), je serai en mesure de dire que j’ai réussi à _____________. Je célébrerai cet accomplissement en ________________. »

« Nous devons redéfinir nos possibilités, puis, ensemble, faire de ce rêve une réalité, conclut Mme Egwuonwu. Je vous souhaite de devenir la version de vous-mêmes que vous savez, en votre for intérieur, que vous deviez être. »

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