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Perspectives

La cour d'appel de la Colombie-Britannique réduit le délai de préavis d'un salarié ayant peu d'ancienneté

Dans la décision Munoz v. Sierra Systems Group Inc, 2016 BCCA 140, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a récemment examiné un préavis de dix mois octroyé à un employé comptant moins de trois années d'ancienneté. Le demandeur était un spécialiste en TI qualifié qui parlait couramment l'espagnol. La défenderesse l'avait recruté et incité à quitter son emploi de sorte qu'il puisse travailler presque exclusivement avec l'un de ses principaux clients. Dans le cadre de cette entente, le demandeur avait choisi de délaisser son mode de rémunération prévoyant un salaire de base au profit d'un régime de rémunération horaire en vertu duquel il toucherait un taux plus élevé pour chaque heure facturée au client mais serait « mis en inactivité » (c.-à-d. qu'il ne serait pas payé) pendant toutes les périodes non facturées. Quelques mois plus tard, le client cessa de travailler avec le demandeur, lequel est ensuite demeuré inactif pendant les quatre mois suivants avant que la défenderesse ne lui donne finalement son avis de cessation d'emploi.

Le juge de première instance a tiré un certain nombre de conclusions en faveur de l'octroi, au demandeur, d'un long délai de préavis de dix mois. La nature précise de l'emploi du demandeur nécessitait des compétences spécialisées en matière de TI et la maîtrise de l'espagnol pour combler les besoins du client et à cet égard, le juge de première instance a estimé que les perspectives professionnelles de quelqu'un possédant les compétences spécialisées du demandeur étaient [traduction] « très limitées », tout particulièrement du fait que celui-ci n'avait pas travaillé durant la période au cours de laquelle il avait été mis en inactivité. Le juge de première instance a en outre relevé la présence d'incitation dans la façon dont la défenderesse avait recruté le demandeur et a insisté sur la présence, dans le contrat de travail, de clauses de non-concurrence et de non-sollicitation. Enfin, puisque le demandeur est demeuré inactif et n'avait pas de revenu au moment de sa cessation d'emploi, le juge de première instance a évalué ses dommages-intérêts en s'appuyant sur ses gains annuels au cours de l'année précédant immédiatement la dernière journée avant qu'il ne soit mis en inactivité.

La Cour d'appel s'est montrée en désaccord et a estimé que le juge de première instance avait erré en s'appuyant sur le fait que le demandeur avait été mis en inactivité pour démontrer que les perspectives professionnelles de quelqu'un possédant ses compétences étaient très limitées. La Cour d'appel a souligné que l'absence de travail à l'interne ne permettait pas logiquement d'en venir à la conclusion qu'il n'y avait pas de travail comparable à l'externe et a réduit, pour cette raison, le délai de préavis de dix à huit mois. Cependant, les conclusions du juge de première instance à l'effet qu'il y avait eu de l'incitation dans le recrutement du demandeur et que la présence de la clause de non-sollicitation dans le contrat de travail du demandeur l'avait raisonnablement amené à considérer qu'il ne pouvait offrir ses services aux clients de la défenderesse dans le cadre de sa recherche d'emploi n'ont pas été infirmées. S'agissant du calcul des dommages-intérêts, la Cour d'appel a estimé que le juge de première instance avait erré en ne s'appuyant que sur les 12 mois précédant le moment où le demandeur était devenu inactif. Le demandeur avait accepté de profiter de périodes mieux rémunérées et d'assumer le risque de subir des périodes non rémunérées et il ne pouvait s'attendre à éviter d'avoir à remplir sa part de l'entente en ne touchant que la rémunération plus élevée, durant le délai de préavis. Les dommages-intérêts ont donc été évalués en fonction de la période de 12 mois précédant immédiatement l'avis de cessation d'emploi, laquelle englobait huit mois de [ traduction ] « travail abondant » et quatre mois durant lesquels le demandeur est demeuré inactif.

Pour l'avenir, bien que le fait que la Cour d'appel ait, en l'espèce, abrégé le délai de préavis puisse laisser entrevoir la perspective d'un examen plus rigoureux des délais de préavis de plus en plus longs concédés aux employés ayant peu d'années de service, le délai accordé demeure important et la décision n'a pas infléchi la tendance générale. Les employeurs qui souhaitent limiter le risque auquel ils s'exposent en matière de délai de préavis plus long qu'auparavant pour des employés compétents ayant peu d'années de service, devraient s'assurer de compter sur des clauses de cessation d'emploi bien rédigées en plus d'envisager la possibilité d'inclure une disposition autorisant la renonciation aux clauses restrictives lorsque l'effet nuisible de ces dernières l'emporte sur les avantages qui en découlent.

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