une main qui tient une guitare

Perspectives

Faire avancer les initiatives en matière de diversité, d’équité et d’inclusion en sondant les employés

Au printemps 2020, le mouvement Black Lives Matter a suscité des conversations dans le monde entier sur le racisme systémique et les préjugés inconscients. Les entreprises réévaluent donc leurs politiques en matière de diversité, d’équité et d’inclusion (DEI), et examinent de près ce que leurs propres données révèlent sur leur rôle dans la réduction – ou la perpétuation – des inégalités au sein des groupes marginalisés.

Plusieurs entreprises sont en train de mener des sondages sur la DEI afin de recueillir des renseignements démographiques et d’adopter des politiques de DEI plus robustes. Dans ces sondages, on cherche à savoir comment les employés s’identifient au moyen de questions portant notamment sur l’identité de genre, les pronoms à privilégier, l’orientation sexuelle, la « race », l’origine ethnique ou culturelle, l’affiliation religieuse ou spirituelle, les handicaps, la situation familiale et le statut d’Autochtone. Dans un monde de plus en plus axé sur les données, les résultats d’un sondage sur la DEI peuvent révéler des informations précieuses au sujet d’une organisation et guider la prise de décisions futures. Cependant, les entreprises pourraient se demander si leur tentative de faire avancer les initiatives de DEI par ces sondages les expose à des risques juridiques relativement à leurs obligations en matière de respect de la vie privée ou de droit de l’emploi.

Considérations relatives à la protection de la vie privée

Lorsque des sondages sur la DEI sont menés, des renseignements personnels sont recueillis. Selon les lois canadiennes sur la protection de la vie privée en matière d’emploi, les entreprises peuvent recueillir ce type de renseignement à condition qu’elles obtiennent le consentement éclairé et exprès de leurs employés et que ceux-ci acceptent volontairement de répondre au sondage. Les organisations doivent fournir des informations précises aux employés, notamment les motifs de la collecte de renseignements personnels. Les entreprises qui font appel à des fournisseurs de services situés à l’extérieur du Canada pourraient devoir se conformer à des exigences de déclaration supplémentaires.

La protection des renseignements personnels est un enjeu important qu’il faut prendre au sérieux lors de tout sondage sur la DEI. Les entreprises peuvent atténuer les risques en appliquant des mesures rigoureuses de protection des renseignements personnels. Elles peuvent envisager de limiter l’accès aux renseignements d’identification à un petit groupe de personnes qui ont « besoin d’en connaître » (au sens strict) et employer des mesures de protection techniques comme la pseudo-anonymisation et le chiffrement. Les entreprises qui souhaitent déclarer ou partager des renseignements personnels recueillis dans le cadre de leurs sondages sur la DEI, que ce soit à l’interne ou à l’externe, doivent instaurer un processus de protection contre l’inclusion accidentelle de renseignements d’identification dans les rapports. Les entreprises doivent également se pencher sur la conservation des renseignements personnels, car les lois canadiennes sur la protection de la vie privée en matière d’emploi prévoient des limites quant à la durée de la conservation des renseignements.

Considérations relatives à l’emploi

Des entreprises peuvent chercher à utiliser les renseignements recueillis dans le cadre de sondages sur la DEI pour prendre des décisions d’embauche, de promotion et d’avancement qui cadrent avec leurs objectifs d’équité en matière d’emploi. Cela est généralement permis, car les lois canadiennes sur les droits de la personne prévoient des exceptions pour les programmes visant à promouvoir les intérêts des groupes historiquement défavorisés.

Par exemple, aux termes du Human Rights Code de la Colombie-Britannique, il n’est pas discriminatoire de mettre en œuvre un programme d’équité en matière d’emploi ayant pour objectif d’améliorer la situation d’individus ou de groupes défavorisés si le programme en question atteint ou est raisonnablement susceptible d’atteindre cet objectif. De manière similaire, le Code des droits de la personne de l’Ontario indique qu’il n’est pas discriminatoire de mettre en œuvre un programme spécial visant à atténuer les contraintes ou les désavantages économiques, à aider les individus ou les groupes défavorisés à atteindre ou à tenter d’atteindre l’égalité des chances, ou à éliminer la discrimination.

À titre de pratique exemplaire, les organisations devraient mettre en place des programmes formels, au lieu d’utiliser une simple liste de priorités pour influencer des décisions de manière ponctuelle. La législation sur les droits de la personne en Colombie-Britannique et en Ontario permet aux organisations de présenter une demande d’approbation ou de désignation d’un programme auprès des commissions des droits de la personne. L’approbation ou la désignation n’est pas requise, mais constitue néanmoins une preuve du caractère non discriminatoire du programme aux termes de la législation sur les droits de la personne. Même si elles peuvent être difficiles à obtenir, l’approbation et la désignation peuvent s’avérer extrêmement utiles pour une organisation faisant l’objet d’une plainte pour discrimination. Malgré les dispositions en la matière de leurs lois habilitantes, certaines commissions des droits de la personne n’ont pas instauré de processus formel d’approbation ou de désignation des programmes.

Bien entendu, même si les organisations peuvent utiliser les renseignements personnels recueillis dans le cadre de sondages pour faire avancer la diversité, l’équité et l’inclusion au travail, la connaissance par un décideur d'une caractéristique qui désavantage un employé peut soulever des questions quant à la bonne foi d'une décision. Il s’agit d’une raison de plus pour limiter l’accès aux renseignements d’identification aux personnes ayant strictement « besoin d’en connaître » (généralement à l’exclusion de l’autorité hiérarchique) et pour utiliser les données sur la DEI à des fins décisionnelles conformément à un programme formel.

Conclusion

Alors que les initiatives de DEI deviennent de plus en plus importantes pour les entreprises et les consommateurs, les organisations utilisent de plus en plus les sondages sur la DEI et les renseignements précieux qui peuvent en découler. Pourvu que les entreprises respectent leurs obligations en matière de respect de la vie privée et répondent aux exceptions d’action positive prévues par les lois canadiennes sur les droits de la personne, les données issues de ces sondages peuvent être recueillies et utilisées dans des initiatives DEI. Les données démographiques peuvent révéler des modèles et des tendances historiques au sein des organisations. Elles peuvent également être utilisées pour contourner ces modèles et ces tendances dans la prise de décisions futures et la planification de la relève.

Les auteurs aimeraient remercier Danielle Windt pour sa contribution à la rédaction de cet article.

BLG a une équipe d’avocats spécialisés en droit du travail et de l’emploi et en cybersécurité, respect de la vie privée et protection des renseignements personnels et conseille régulièrement ses clients relativement à ces questions. Pour obtenir de l’aide, veuillez communiquer avec l’une des personnes-ressources indiquées ci-dessous.

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