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Perspectives

Ce qu’il faut savoir au sujet des frais supplémentaires sur les transactions par carte de crédit

Entre 2010 et 2018, cinq actions collectives liées aux frais facturés par des commerçants ont été intentées en Alberta, en Colombie-Britannique, en Ontario, au Québec et en Saskatchewan (collectivement, les « actions collectives »)1. À la suite des actions collectives, les principaux réseaux de cartes de crédit qui interdisaient la facturation de frais supplémentaires ont notamment leurs règles afin de permettre aux entreprises et aux commerçants canadiens d’exiger des frais supplémentaires sur les transactions par carte de crédit à compter du 6 octobre 2022.

Anciennes règles concernant les frais supplémentaires

Les frais supplémentaires sont des frais que les commerçants ou les entreprises peuvent ajouter à une transaction par carte de crédit ou de débit.

La Loi sur la protection du consommateur du Québec exige que le prix demandé ne soit pas supérieur au prix annoncé, à quelques exceptions près comme les taxes de vente (voir le paragraphe c de l’article 224). Les tribunaux ont conclu que cette obligation rendait illégale l’imposition de frais supplémentaires.

Mis à part le Québec, aucune autre province (ou territoire) du Canada n’a de loi interdisant les frais supplémentaires2. Les commerçants qui souhaitent imposer ce type de frais doivent tenir compte des récentes modifications apportées à la Loi sur la concurrence en ce qui concerne l’indication de prix partiel. L’indication de prix partiel consiste à proposer un produit ou un service à un prix qui n’est pas atteignable parce que les consommateurs doivent également payer des frais supplémentaires pour l’acheter. Cette pratique commerciale est considérée comme trompeuse et est interdite par les dispositions civiles et criminelles de la Loi sur la concurrence.

Toutefois, avant le 6 octobre 2022, il était interdit aux entreprises de facturer des frais supplémentaires en vertu des modalités générales des principaux réseaux de cartes de crédit.

Dans le cadre de leur règlement dans les actions collectives, ces réseaux ont accepté de modifier leurs règles et d’autoriser les commerçants à imposer des frais supplémentaires à compter du 6 octobre 2022 au Canada.

Frais supplémentaires

Chaque fois qu’une entreprise ou un commerçant accepte un paiement par carte de crédit, l’entreprise ou le commerçant en question doit payer des frais (les « frais d’escompte ») à la société qui traite le paiement (l’« acquéreur »). Les acquéreurs établissent les frais selon leurs modèles commerciaux, qu’ils imposent aux commerçants en échange de leur acceptation de paiements par carte de crédit; il s’agit habituellement d’un pourcentage du prix payé par le consommateur pour un bien ou un service du commerçant.

Afin d’accepter les paiements effectués au moyen des principales cartes de crédit, les entreprises et les commerçants doivent accepter les règles des réseaux de cartes dans leur entente avec les acquéreurs. Ces règles comprenaient autrefois l’interdiction d’imposer des frais supplémentaires sur les achats effectués avec une carte de crédit.

En 2013, le Bureau de la concurrence a contesté sans succès la règle d’interdiction des frais supplémentaires, alléguant qu’elle constituait une pratique de maintien des prix au sens de l’article 76 de la Loi sur la concurrence. Le Tribunal de la concurrence a statué que le maintien des prix nécessite une revente, et que le Commissaire de la concurrence n’avait pas établi que les clients de certains réseaux de cartes de crédit revendaient les produits. La règle d’interdiction des frais supplémentaires a par la suite été contestée dans le cadre des actions collectives.

Les actions collectives

Dans le cadre des actions collectives, environ 670 000 entreprises et commerçants au Canada (collectivement, les « demandeurs ») ont réclamé des dommages-intérêts à certains réseaux de cartes et institutions financières (collectivement, les « défendeurs »).

Au fil des ans, divers règlements ont été conclus entre les défendeurs et les demandeurs. Le règlement définitif, quant à lui, a été conclu en 2021 : un montant total net de 188 530 000 $, moins les honoraires et débours, sera distribué aux membres de l’action collective3.

Dans leur plainte, les demandeurs avançaient que les modalités générales des principaux réseaux de cartes, auxquelles les commerçants et les entreprises doivent se conformer afin d’accepter des paiements par carte de crédit, leur imposaient des contraintes illégales. Plus précisément, ils alléguaient que l’obligation faite aux commerçants d’honorer toutes les cartes de crédit d’un même réseau, de même que la règle d’interdiction des frais supplémentaires, avait pour effet de restreindre la concurrence entre les réseaux de cartes de crédit. L’obligation d’honorer toutes les cartes faisait en sorte que les commerçants devaient accepter tous les types de carte de crédit, tandis que la règle d’interdiction des frais supplémentaires les empêchait de transmettre ces frais à leurs clients.

En 2022, dans le cadre de leur règlement dans les actions collectives, les principaux réseaux de cartes ont modifié leurs règles et autorisé les commerçants à imposer des frais supplémentaires, sous réserve de certaines conditions.

Conclusion

Les entreprises ou les commerçants qui souhaitent exiger des frais supplémentaires sur les paiements par carte de crédit au Canada doivent examiner attentivement les conditions établies par leur réseau de cartes et les dispositions de la Loi sur la concurrence en matière d’indication de prix partiel. Ils pourraient avoir à donner un préavis avant d’imposer des frais supplémentaires et, dans certains cas, ne pas être en mesure d’en exiger. De plus, ils doivent divulguer clairement les frais supplémentaires aux clients avant la conclusion d’une transaction.

L’équipe de BLG est en mesure de vous aider à bien comprendre ces changements. Pour toute question, veuillez communiquer avec l’un·e des auteur·rices du présent article ou l’une des personnes-ressources dont le nom figure ci-après.


1 Les actions collectives sont les suivantes : Bancroft-Snell v. Visa Canada Corporation (Ontario), Coburn and Watson’s Metropolitan Home v. Bank of America Corporation (Colombie-Britannique), Macaronies Hair Club and Laser Center Inc., Operating as Fuze Salon v. BofA Canada Bank (Alberta), Hello Baby Equipment Inc. v. BofA Canada Bank (Saskatchewan), et 9085-4886 Quebec Inc. c. Visa Canada Corporation (Québec).

2 La Loi sur la protection du consommateur du Québec, RLRQ, ch. P-40.1, interdit l’imposition de frais supplémentaires aux personnes physiques (consommateurs).

3 Coburn and Watson’s Metropolitan Home v. Bank of Montreal, 2021 BCSC 2398 (paragr. 5).

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