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Perspectives

D'importantes modifications de la Loi sur la protection du consommateur sont désormais en vigueur

Le 5 octobre 2023, la Loi protégeant les consommateurs contre l’obsolescence programmée et favorisant la réparabilité et l’entretien des biens (la Loi), connue à l’origine sous le nom de projet de loi 29, a reçu la sanction royale. Cette Loi apporte des changements importants à la Loi sur la protection du consommateur (LPC) du Québec. Bien que certaines dispositions soient déjà entrées en vigueur, plusieurs d'entre elles entreront graduellement en vigueur sur une période de trois ans et certaines dispositions nécessiteront l'adoption de règlements. Cet article donne un aperçu des changements en vigueur et à venir.

Comme son titre l'indique, la Loi introduit une série de nouvelles protections pour les consommateurs québécois. Elle vise particulièrement les fabricants, les détaillants, les concessionnaires et les constructeurs automobiles, et a une incidence sur les commerçants qui vendent des garanties prolongées.

Cependant, la Loi modifie aussi de façon considérable les risques juridiques pour toute entreprise québécoise faisant affaire avec des consommateurs, et ce, en raison des amendes substantielles qui pourront sous peu être imposées en cas de non-respect de la LPC. En effet, dans moins de quinze mois, le non-respect de cette loi pourra entraîner des amendes allant jusqu'à 5 % du chiffre d'affaires mondial de l'exercice financier précédent de l’entreprise.

Compte tenu de ces nouvelles sanctions potentielles, il serait prudent que les entreprises faisant affaire avec des consommateurs au Québec réévaluent, en amont, leur conformité à la LPC.

Une augmentation significative des amendes potentielles

La Loi augmentera considérablement les montants des amendes prévues par la LPC, puisque l'amende maximale pour certaines infractions sera haussée à 5 % du chiffre d'affaires mondial de l'exercice financier précédent de l'entreprise.

La Loi accordera également au président de l'Office de la protection du consommateur le pouvoir d'imposer des sanctions administratives pécuniaires en cas de « manquements objectivement observables » à la LPC. Ces manquements seront définis par règlement. Bien que le montant maximal d’une sanction administrative pécuniaire sera relativement bas, soit 3 500 $ par manquement, toute ordonnance sera publique ce qui augmentera vraisemblablement le risque de réclamations liées à la non-conformité à la LPC, y compris les risques d’actions collectives.

La Loi prévoit que les changements susmentionnés entreront en vigueur quinze mois après la date à laquelle elle a reçu la sanction royale. Cette période permettra aux entreprises de réévaluer leur conformité globale à la LPC à la lumière des nouveaux risques associés à une violation potentielle de la LPC.

Interdiction de l'obsolescence programmée

L'une des modifications les plus notables déjà en vigueur est l'interdiction de « faire le commerce d’un bien pour lequel l’obsolescence est programmée », le fabricant de ces biens étant réputé comme faisant un tel commerce.

La Loi prévoit une définition très large de ce qui constitue l’obsolescence programmée, en prévoyant que l'obsolescence d'un bien est programmée « lorsqu'il fait l’objet d’une technique visant à réduire sa durée de vie normale de fonctionnement ».

Nouveau pouvoir d'établir des normes techniques

La Loi accorde également au gouvernement le pouvoir d'établir des normes techniques ou de fabrication pour des biens, y compris des normes visant à assurer l'interopérabilité entre des biens et des chargeurs, et de prescrire dans quels cas et à quelles conditions ces normes s'appliquent. Le gouvernement pourra ainsi, par exemple, imposer l'introduction d'un chargeur universel pour certains appareils électroniques, à l'instar de ce que fait l'Union européenne. Ces normes seront introduites par voie réglementaire.

La règle « anti-citron » pour les automobiles

La Loi crée de surcroît une règle « anti-citron ». Cette règle, une première au Canada, permet aux consommateurs qui sont propriétaires ou locataires à long terme d'une automobile de demander à un tribunal de déclarer leur véhicule en tant que « véhicule gravement défectueux » lorsque certaines conditions sont remplies, telles que des tentatives répétées de réparation pour certaines défectuosités.

Une telle déclaration judiciaire permettra aux consommateurs d’obtenir, par exemple, la nullité du contrat d’achat ou de location et des dommages-intérêts compensatoires, soit de la part du fabricant ou du concessionnaire automobile. Les concessionnaires automobiles devront également informer les acheteurs ultérieurs que l'automobile a été déclarée comme étant gravement défectueuse.

Obligation de proposer une inspection pour les voitures et les biens loués

La Loi introduit aussi de nouveaux droits pour les consommateurs ayant conclu des contrats de location automobile à long terme.

Ces changements prévoient que les commerçants devront proposer aux clients une inspection gratuite de leur véhicule ou de leurs biens au moins 90 jours avant la fin du contrat de location. Si le consommateur est d'accord, l'inspection doit avoir lieu au moins 30 jours et au plus 60 jours avant la fin du bail, soit au domicile du consommateur, soit à l’établissement du commerçant. Suivant l'inspection, un rapport écrit doit être immédiatement remis au consommateur et doit contenir certaines informations obligatoires.

Ces modifications entreront en vigueur six mois après la date de la sanction royale de la Loi.

Pièces de rechange et services de réparation

Deux ans après la sanction royale, la Loi exigera que les pièces de rechange, les services de réparation et les informations nécessaires à l'entretien ou à la réparation des biens, y compris les logiciels de diagnostic et les mises à jour, soient disponibles pendant une période raisonnable après la signature du contrat dans les cas où les biens sont de nature à nécessiter un entretien. Toutefois, les commerçants et les fabricants pourront déroger à ces obligations en avertissant le consommateur par écrit, avant la signature du contrat, qu'ils ne fournissent pas de pièces de rechange, de services de réparation ou d'informations nécessaires à l'entretien ou à la réparation des biens. Le gouvernement pourra cependant limiter, par voie réglementaire, les circonstances où une telle dérogation sera permise, notamment en prescrivant des cas où la disponibilité des pièces de rechange, des services de réparation ou des informations nécessaires à l'entretien ou à la réparation des biens doit être garantie.

La Loi exigera également qu'il soit possible d'installer les pièces de rechange à l'aide d'outils couramment disponibles et sans causer de dommages irréversibles aux biens.

En outre, un commerçant ou un fabricant tenu de garantir la disponibilité des pièces de rechange, des services de réparation ou des informations nécessaires à l'entretien ou à la réparation de ses biens devra mettre ces articles et services à la disposition des consommateurs à un prix raisonnable. La Loi prévoira qu’un prix est raisonnable s’il ne « décourage pas l’accès par le consommateur ». Le gouvernement pourra préciser les cas pour lesquels le prix des pièces de rechange et des services de réparation sera présumé décourager l'accès par le consommateur.

Droit d'accès gratuit à certaines informations

Deux ans après la sanction royale de la Loi, les constructeurs automobiles seront tenus de donner aux propriétaires et aux locataires à long terme d’automobiles, ainsi qu’à leurs représentants autorisés, l'accès aux données de leur automobile à des fins de diagnostic, d'entretien ou de réparation. Cet accès devra être gratuit.

Cependant, la Loi ne précise pas ce qui est inclus dans la notion de « données de l'automobile », pour les fins de cette nouvelle obligation.

Garantie de bon fonctionnement

La Loi établit également une garantie de « bon fonctionnement » applicable à certains biens précis, notamment les réfrigérateurs, les congélateurs, les lave-vaisselle, les machines à laver, les sèche-linge, les ordinateurs portables, les tablettes électroniques, les téléphones cellulaires et les consoles de jeux vidéo. Le gouvernement peut également, par voie réglementaire, étendre cette nouvelle garantie à tout autre type de biens.

En résumé, cette garantie exigera que ces biens demeurent pleinement fonctionnels pendant une période déterminée. La durée de la garantie sera précisée ultérieurement par règlement et variera vraisemblablement selon la catégorie de biens en cause.

Cette garantie de bon fonctionnement devra être explicitement communiquée aux consommateurs avant qu'ils ne concluent un contrat de vente ou de location à long terme portant sur des biens auxquels elle s’applique.

La durée de la garantie de bon fonctionnement doit être précisée par voie réglementaire. Cette nouvelle garantie entrera en vigueur trois ans après la sanction royale de la Loi.

Informations obligatoires

La Loi prévoit par ailleurs de nouvelles obligations d'information pour les commerçants et les fabricants. Ces obligations touchent notamment la garantie de bon fonctionnement, ainsi que la disponibilité des pièces de rechange, les services de réparation et l'entretien des biens. Par exemple, les commerçants devront indiquer la durée de la garantie de bon fonctionnement à proximité du prix annoncé d'un produit et de manière évidente. Cette obligation s'appliquera également au commerce électronique.

Les modalités applicables à ces nouvelles obligations seront, dans une large mesure, précisées par voie réglementaire et entreront en vigueur trois ans après la sanction royale de la Loi.

Garanties supplémentaires (garanties prolongées)

La Loi comporte enfin des modifications concernant les garanties supplémentaires, qui sont souvent désignées par l’expression « garanties prolongées ». À cet égard, de nombreuses modifications sont déjà en vigueur, tandis que d'autres entreront en vigueur trois ans suivant la date de sanction royale de la Loi.

En particulier, la LPC prévoit un nouveau droit pour les consommateurs d'annuler la garantie supplémentaire qu'ils ont achetée dans les 10 jours suivant la conclusion du contrat, à leur seule discrétion et sans frais ni pénalités, à condition qu'ils envoient un avis écrit au commerçant. Le contrat de garantie supplémentaire est annulé dès l'envoi de cet avis. Le commerçant devra alors rembourser au consommateur les montants payés pour la garantie supplémentaire.

Ce nouveau droit de résiliation ne s'applique pas lorsque le contrat de garantie supplémentaire est souscrit par un assureur.

En outre, dans certaines circonstances, la période de résiliation de 10 jours sera prolongée jusqu'à un an.

Conclusion

Compte tenu des modifications déjà apportées à la LPC et de l'augmentation significative des sanctions en cas de non-conformité, les commerçants faisant affaire au Québec, quel que soit leur secteur d'activité, devraient envisager d’évaluer dès maintenant leur conformité à cette Loi.

De plus, les détaillants et les fabricants faisant affaire au Québec, y compris les concessionnaires et les fabricants d'automobiles ainsi que tout commerçant vendant des garanties supplémentaires aux consommateurs, devraient s'assurer qu'ils se conforment aux nouvelles obligations déjà en vigueur.

Si vous avez des questions sur cette nouvelle Loi ou si vous avez besoin d'informations sur la façon dont vous devez vous conformer à la LPC, contactez les auteurs ou l'un des membres de nos équipes spécialisées dans le commerce de détail et le commerce électronique.

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