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ARTICLE

BLG obtient la nomination d’un séquestre pour des résidences pour personnes âgées (RPA) en difficulté

Au terme d’une audition contestée, BLG a obtenu la nomination de Raymond Chabot inc. à titre de séquestre aux actifs de 9444-4486 Québec inc., 9444-4494 Québec inc., 9444-4441 Québec inc. et 9444-4445 Québec inc. (collectivement les « Débitrices »)1.

Faits

Dans la foulée de la pandémie de COVID-19, les Débitrices acquièrent deux résidences pour personnes âgées. Cette transaction est financée par La Banque Toronto-Dominion (la « Banque »).

À compter de mai 2023, les Débitrices rencontrent des difficultés financières et se retrouvent en défaut de respecter leurs engagements financiers à l’égard de la Banque.

Une convention de tolérance intervient pour ensuite être renouvelée, amendée et prolongée à de multiples reprises. Or, malgré les nombreuses démarches pour tenter de sortir l’entreprise de l’impasse, les défauts des Débitrices continuent de s’accumuler. Celles-ci étaient notamment en défaut de payer les taxes foncières à échéance, de respecter certains ratios et d’effectuer des injections de capitaux, alors que leurs comptes bancaires accusaient des découverts non autorisés à répétition.

En janvier 2025, la Banque, représentée par BLG, dépose finalement une requête en nomination de séquestre visant à mettre en place un processus de vente des actifs des Débitrices.

Les Débitrices ont contesté la requête, au motif notamment que la nomination n’était pas requise, que les Débitrices n’étaient pas insolvables, qu’elles étaient en mesure d’assurer la gestion de leurs opérations et que la Banque ne subissait pas de préjudice irréparable en l’absence de la nomination d’un séquestre.

Analyse

La Cour supérieure, sous la plume de l’honorable juge Janet Michelin, fait une revue des principes applicables en la matière.

La Loi sur la faillite et l’insolvabilité et l’arrêt Séquestre de Media5 Corporation

D’abord, la Cour doit considérer les dispositions de l’article 243 (1) de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité qui prévoient la possibilité de nommer un séquestre. À cet égard, la Cour note que les créanciers garantis ne bénéficient pas d’un droit à la nomination d’un séquestre : il s’agit plutôt d’un pouvoir discrétionnaire du Tribunal. Ce dernier doit prendre en considération les critères (procéduraux et substantifs) applicables énoncés dans l’arrêt Séquestre de Media5 Corporation2 de la Cour d’appel du Québec, lesquels sont maintenant bien connus.

Le préjudice irréparable n’est pas un critère

La Cour souligne que seuls les critères énoncés à cet arrêt sont applicables pour déterminer s’il est juste ou opportun de nommer un séquestre. Elle rappelle que d’autres autorités confirment qu’il n’est pas nécessaire que le créancier garanti requérant démontre qu’il subira un préjudice irréparable si l’ordonnance de nomination n’est pas émise.

De plus, la Cour note au passage que lorsqu’un droit à la mise sous séquestre est aménagé à même le contrat de sûreté, la nature extraordinaire de la nomination d’un séquestre est considérablement réduite. Dans un tel cas, les facteurs à considérer afin de déterminer s’il est juste ou opportun de nommer un séquestre incluent notamment que [ci-dessous, notre traduction] :

(i) la sûreté du prêteur risque de se détériorer;

(ii) la confiance en la gestion des débiteurs s’effrite;

(iii) il faut stabiliser et préserver les activités des débiteurs;

(iv) d’autres créanciers, en raison de leur position et de leurs intérêts, sont favorables à la nomination d’un séquestre.3

Les critères relatifs à l’insolvabilité

La Loi sur la faillite et l’insolvabilité prévoit la définition d’une « personne insolvable » à son article 2. Cette définition établit trois (3) tests, soit :

  1. la personne est incapable de faire honneur à ses obligations au fur et à mesure de leur échéance;
  2. la personne a cessé d’acquitter ses obligations courantes dans le cours ordinaire des affaires et au fur et à mesure de leur échéance;
  3. la totalité des biens de la personne n’est pas suffisante ou ne suffirait pas s’il en était disposé lors d’une vente par autorité de justice pour permettre l’acquittement de toutes ses obligations échues ou à échoir.

À cet égard, la Cour souligne qu’il ne s’agit pas de tests cumulatifs : il suffit de répondre à un seul de ces trois (3) tests.

« Il suffit que la personne réponde à un seul de ces trois tests pour qu’on puisse la considérer comme insolvable. Ainsi, une personne peut satisfaire à la définition de « personne insolvable » sous la LFI lorsqu’elle fait défaut de payer ses créanciers même si elle détient des actifs dont la valeur estimée est supérieure à la valeur de ses passifs. Si le créancier garanti établi que la personne cesse de faire honorer ses obligations au fur et à mesure de leur échéance, le fardeau de la preuve est renversé et il relève du débiteur d’établir qu’il peut s’acquitter de ses obligations financières4. »

(références omises)

Décision

La Cour a accueilli la requête de la Banque.

Dans un premier temps, la Cour conclut que l’insolvabilité des Débitrices est démontrée, et ce, malgré les allégations de celles-ci voulant que la valeur de leurs actifs est supérieure à celle de leurs passifs, puisque la Banque a démontré que les Débitrices n’étaient pas en mesure de gérer leur encaisse et de respecter leurs obligations au fur et à mesure de leurs échéances.

L’une des particularités de cette affaire est que, bien que la gestion des opérations des Débitrices n’était pas remise en cause, les importantes lacunes dans la gestion de leurs finances ont permis de justifier la nomination d’un séquestre.

Dans un second temps, la Cour conclut de la preuve que la Banque avait agi de bonne foi. Sur ce point, la Cour souligne l’importance du lien de confiance dans le cadre de la relation d’affaires entre la Banque et ses clients et que ceux-ci n’ont pas un droit absolu à cette relation.

« En l’espèce, le Tribunal conclut que la Banque agit de bonne foi. Elle ne fait plus confiance aux Débitrices. Ainsi, elle a le droit de mettre fin à sa relation avec les Débitrices après leur avoir donné amplement de chance (sic) soit de remédier à la situation, de vendre les Immeubles ou de refinancer. […] il se peut que les Débitrices aient dû exploiter leur entreprise dans des circonstances difficiles en raison de la pandémie COVID 19. […] C’est peut-être le cas, mais ces faits n’obligent pas la Banque à rester leur partenaire pendant qu’ils règlent la situation5»

Points à retenir

La Cour reconnaît qu’un processus de vente chapeauté par le séquestre est préférable à une vente sous contrôle de justice en vertu du Code civil du Québec dans le contexte de l’exploitation continue d’une RPA. Cela permettra de maintenir les opérations pendant le processus de vente, ce qui permettra en retour de respecter les objectifs de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité visant à éviter, dans la mesure du possible, les pertes sociales et économiques résultant de la liquidation d’une entreprise insolvable.

Communiquez avec nous

Pour toute question au sujet de cette décision ou pour obtenir de l'aide dans une démarche en insolvabilité, n'hésitez pas à communiquer avec les membres du groupe Insolvabilité et restructuration de BLG, à commencer par les personnes-ressources ci-dessous.

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