À l’été 2025, le Canada et son nouveau gouvernement se trouvent à la croisée des chemins. Les six premiers mois de l’administration Trump ont transformé (probablement à jamais) la relation du Canada avec son plus proche voisin et principal partenaire commercial. Bien que l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM) ait limité les dégâts pour l’instant, les menaces de droits de douane (généraux et sectoriels) et la perspective d’une renégociation de l’ACEUM en 2026 sont autant de gros nuages noirs à l’horizon. Ce climat d’incertitude freine notre économie : les entreprises hésitent à se moderniser ou à prendre de l’expansion quand les règles du jeu n’arrêtent pas de changer.
De plus, la One Big Beautiful Bill Act, adoptée en juillet 2025, prévoit de multiples changements fiscaux conçus pour stimuler à fond l’économie états-unienne : déduction plus rapide des dépenses d’entreprise, subventions à l’exportation, nouveaux allègements fiscaux pour les investisseurs et prolongation des baisses d’impôt sur le revenu, le tout au prix d’un déficit budgétaire substantiel. Jumelés aux nouveaux droits de douane – qui ne sont ni plus ni moins que des taxes à la consommation parasitaires –, ces changements constituent un virage majeur dans la politique budgétaire des États-Unis et un excellent moyen d’attirer des investissements d’entreprises étrangères.
Pendant ce temps, l’économie canadienne continue de s’enfoncer dans un marasme généralisé, faisant du surplace, voire reculant légèrement. L’écart de productivité se creuse non seulement avec les États-Unis, mais avec beaucoup de pays de l’OCDE. Sur le plan de l’innovation, notre habituelle aversion au risque nous empêche de participer pleinement à l’économie de demain. Le Canada est [traduction] « bon dernier du G7 au chapitre des infrastructures informatiques d’IA », selon un rapport. Nos entreprises peinent encore à innover, au point où elles risquent d’être écartées des secteurs à valeur élevée de l’économie mondiale qui gagnent en importance, au profit des pays qui s’affairent à créer une masse critique pour devenir attractifs dans cette économie de l’innovation.
Notre nouveau gouvernement doit faire de ces questions une priorité. Si la politique fiscale n’est pas une panacée, elle fait certainement partie de la solution. Ce texte présente les leviers fiscaux dont nous disposons pour nous attaquer au problème et réagir aux décisions des États-Unis. Il se veut un point de départ dans la recherche des meilleurs incitatifs pour obtenir les résultats souhaités. L’attentisme et le gradualisme typiquement canadiens ne fonctionnent pas en contexte de transformation rapide et intense. Le Canada doit agir maintenant en investissant massivement dans son économie s’il veut protéger son assiette fiscale à long terme et les programmes sociaux qu’il finance.