une main qui tient une guitare

Article

Accord moratoire : Le progrès dans une action en assurance constitue du progrès dans l’action principale

Dans l’affaire Center Street Limited Partnership v. Nuera Platinum Construction Ltd2025 ABCA 290, la Cour d’appel de l’Alberta devait se pencher sur les effets d’un accord moratoire et d’une action intentée à la suite d’une négation de couverture sur l’action « principale ».

Les faits

Le 7 mars 2015, un incendie s’est déclaré sur le toit d’un immeuble commercial appartenant à Center Street Partnership (« Center Street »).

Des travaux de construction étaient en cours à ce moment, un projet sous la supervision de Neura Platinum (Neura). Over & Above Reno and Contracting était responsable de la toiture et de l’étanchéisation. Center Street a intenté une action contre les sociétés de construction pour négligence et rupture de contrat (l’« action contre les sociétés de construction »), de même qu’une action contre son assureur, qui a refusé de couvrir ses pertes (l’« action contre l’assureur »).

Le 20 avril 2017, Center Street a convenu par écrit avec les sociétés de construction que l’action contre l’assureur serait entendue en premier, et que certains éléments de preuve y étant présentés ne pourraient pas l’être contre elles. Il a aussi été convenu que, si ses pertes étaient couvertes par l’assureur, Center Street laisserait tomber l’action contre elles.

Le 14 juillet 2021, Nuera a signifié à Center Street qu’elle allait demander le rejet de l’action contre les entrepreneurs pour délai excessif en vertu du paragraphe 4.33(2) des Alberta Rules of Court, AR 124/2010, puisqu’aucune mesure n’avait été prise dans le dossier depuis plus de trois ans. Le juge ayant entendu la demande a déterminé que, même si l’entente écrite n’était pas un « accord moratoire », elle liait les deux actions, et donc que le paragraphe 4.33 (2) ne s’appliquait pas. Il a été interjeté appel de cette conclusion.

Analyse

La Cour d’appel de l’Alberta s’est penchée sur deux questions.

Premièrement, l’entente écrite du 20 avril 2017 était-elle un accord moratoire? Selon la Cour, non. S’appuyant sur l’affaire Flock v. Flock Estate, 2017 ABCA 67, elle a conclu que rien dans l’entente n’exprimait clairement l’intention d’éviter le rejet pour délai excessif. Elle a également cité l’affaire Brian W Conway Professional Corporation v. Perera, 2015 ABCA 404 et souligné que les parties qui veulent qu’une entente serve à mettre en suspens un litige doivent l’indiquer clairement et avec précision.

Deuxièmement, les mesures prises dans l’action contre l’assureur ont-elles nettement fait progresser l’action contre les sociétés de construction? La Cour a indiqué que le critère qui était auparavant appliqué dans ce type de décision était celui du « lien inextricable » entre les actions, mais que depuis l’affaire Round Hill Consulting Ltd v. Parkview Consulting, 2025 ABCA 195 (Round Hill), il fallait plutôt employer une approche fonctionnelle pour répondre à la question. Selon l’intimée, le fait qu’un dénouement favorable à l’action contre l’assureur mettrait fin à celle contre les sociétés de construction devrait suffire pour justifier le rejet de la demande fondée sur le paragraphe 4.33(2). La Cour d’appel a souscrit à cette approche et conclu que le progrès dans l’action contre l’assureur constituait un progrès important dans celle contre les sociétés de construction. Pour en arriver à cette conclusion, elle s’est attardée aux attentes communes que les parties ont exprimées dans l’entente écrite.

La Cour d’appel a confirmé la décision de la juge en cabinet et rejeté l’appel.

À retenir

Si les parties souhaitent conclure un accord moratoire, elles doivent rédiger des dispositions claires et précises : si le libellé est ambigu, on pourrait conclure à l’absence d’intention d’éviter le rejet pour délai excessif.

Point particulièrement intéressant pour les assureurs et les assurés : la Cour a conclu qu’une étape dans une action connexe contre un assureur peut être inextricable liée à l’action principale, un résultat qui demeure toutefois rare. À moins qu’il y ait des attentes claires (et écrites) quant au lien entre deux actions et au fait que l’issue de l’une pourrait sonner la fin de l’autre, les parties devraient poursuivre chacune d’elle individuellement ou conclure un accord moratoire sans équivoque.

Communiquez avec nous

Pour tout ce qui touche la décision de la Cour d’appel de l’Alberta ou des questions d’assurance connexes, communiquez avec les auteurs du présent article, l’une des personnes-ressources mentionnées ci-dessous ou le groupe Contestation de réclamations d’assurance de BLG.

Contact principal