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Clauses d’indexation sur les bénéfices futurs et F&A transfrontalières : Gestion des risques ou problèmes après la clôture?

Alors que les conditions du marché restent instables et que les écarts d’évaluation entre acheteurs et vendeurs persistent, les clauses d’indexation sur les bénéfices futurs continuent de s’imposer comme des instruments bien connus dans les opérations de fusions et acquisitions de sociétés fermées, en particulier dans les opérations transfrontalières. Toutefois, le recours à ces clauses ne saurait être considéré comme une solution universelle. Au Canada, elles sont utilisées de manière sélective et stratégique par les architectes des opérations, qui cherchent à gérer et à répartir les risques, à prévoir des incitatifs cohérents et à mener les transactions à leur terme.

Toutefois, elles ne doivent pas servir de raccourci vers un consensus. Elles ne sont pas non plus sans conséquences.

Pour les dirigeants et propriétaires d’entreprise et les investisseurs institutionnels qui souhaitent aller de l’avant avec des acquisitions au Canada, les clauses d’indexation sur les bénéfices futurs exigent une discussion nuancée : quand apportent-elles un avantage? Quand deviennent-elles un obstacle? Comment garantir qu’elles soutiennent l’opération plutôt que de la compromettre?

L’écart d’évaluation est toujours bien présent

Dans le contexte actuel des opérations, l’écart d’évaluation demeure l’une des principales raisons pour lesquelles les opérations stagnent. Les vendeurs mettent en avant le potentiel de croissance, tandis que les acheteurs soulignent l’érosion des marges. Si l’on ajoute les incertitudes propres au contexte transfrontalier (délais liés à la réglementation, pression sur le change, droits de douane, divergences économiques), on comprend aisément l’attrait d’un mécanisme de tarification conditionnelle.

Les clauses d’indexation sur les bénéfices futurs offrent une solution tactique pour combler cet écart : une partie du prix est versée immédiatement, et le versement du solde est conditionnel à l’atteinte, par la société, de certains indicateurs financiers convenus après la clôture. Cette approche permet de limiter les risques en cas de baisse et de préserver le potentiel de hausse, mais elle reporte également d’importants risques, en particulier si le contrôle a changé de mains au moment de la clôture.

Là où les clauses d’indexation sur les bénéfices futurs gagnent du terrain, et là où elles en perdent

Les clauses d’indexation sur les bénéfices futurs s’imposent particulièrement dans les secteurs où la valeur future est difficile à évaluer, notamment :

  • Les sciences de la vie et les technologies médicales, où les essais cliniques ou l’obtention des autorisations réglementaires peuvent s’échelonner sur plusieurs années.
  • Les technologies financières et les logiciels-services, où les revenus initiaux sont parfois modestes, mais où l’acquisition d’utilisateurs et les revenus annuels récurrents reflètent mieux le potentiel réel.
  • Les minéraux critiques et la transition énergétique, où les rendements projetés sont spéculatifs, mais stratégiquement essentiels.
  • Le regroupement de marques grand public, où l’acheteur souhaite assurer la présence des fondateurs en raison du capital de marque incorporel qu’ils apportent.

À l’inverse, elles sont moins fréquentes dans les secteurs où le risque d’intégration est élevé ou lorsque le rendement après la clôture peut être trop facilement manipulé. Dans le secteur manufacturier traditionnel, par exemple, ou dans les acquisitions à forte composante logistique, les acheteurs peuvent privilégier un mécanisme d’ajustement de prix ou de fonds de roulement, plutôt qu’une clause d’indexation sur les bénéfices futurs étalée sur plusieurs années.

Au-delà des chiffres

L’une des raisons pour lesquelles les clauses d’indexation sur les bénéfices futurs font l’objet d’une surveillance accrue s’explique par le fait qu’elles ne relèvent plus uniquement de l’ingénierie financière : ce sont désormais de véritables contrats comportementaux. Lorsque le vendeur reste après la clôture et que les versements futurs dépendent du rendement, les parties doivent s’entendre non seulement sur les chiffres, mais aussi sur la culture, l’autonomie et les priorités stratégiques.

Cela soulève des questions importantes :

  • Le vendeur conservera-t-il un pouvoir opérationnel ou une autre forme de contrôle?
  • Que se passe-t-il si l’acheteur restructure l’entreprise, abandonne une gamme de produits ou réaffecte des ressources?
  • Que se passe-t-il si un ralentissement économique entraîne une baisse de rendement, même si l’entreprise est bien gérée?

Les réponses à ces questions doivent être prises en compte dans la rédaction de la clause, mais aussi dans la façon d’aborder les négociations. Une clause d’indexation sur les bénéfices futurs mal prévue peut susciter du ressentiment après la clôture, nuire à l’intégration et ouvrir la voie à des litiges.

L’accord dans l’accord : une rédaction précise

Les juristes canadiens spécialisés en F&A connaissent déjà ce scénario. Les tribunaux ont tendance à faire respecter ce qui est écrit, en particulier dans le cadre de F&A de sociétés fermées. Si la clause d’indexation sur les bénéfices futurs est vague ou si elle accorde à l’acheteur un large pouvoir décisionnel, le vendeur risque de disposer de peu de voies de recours.

C’est dans ce contexte que la précision juridique devient essentielle.

  • Les indicateurs de rendement doivent être objectifs, mesurables et adaptés au secteur (bénéfices avant intérêts, impôts et dotations aux amortissements [BAIIDA], revenus, jalons réglementaires). Les indicateurs et les méthodes de calcul doivent rester cohérents avant et après la clôture.
  • Les échéances doivent refléter les réalités opérationnelles : une période de 12 à 36 mois est courante, mais ne convient pas à tous les cas.
  • Les clauses restrictives doivent traiter de la continuité des activités, de l’approbation des budgets et de la prise de décisions opérationnelles après la clôture.
  • Les mécanismes de résolution des litiges doivent être pragmatiques, exécutoires et proportionnés à l’envergure de la transaction.

Trop souvent, les parties consacrent plus de temps au prix annoncé qu’à la clarté structurelle de la clause d’indexation sur les bénéfices futurs. Cette approche engendre fréquemment des risques après la clôture, et ce, pour les deux parties.

Quand la clause d’indexation sur les bénéfices futurs révèle un problème plus profond

Il existe une ligne ténue entre l’utilisation d’une clause d’indexation sur les bénéfices futurs pour rapprocher les intérêts et son utilisation comme moyen d’éluder des discussions difficiles. Les responsables d’opérations chevronnés se poseront la question suivante : si les parties ne parviennent pas à s’entendre sur la valeur aujourd’hui, faut-il vraiment conclure l’opération?

Le recours à une clause d’indexation sur les bénéfices futurs ne devrait jamais être automatique. Cet instrument est idéal lorsque le vendeur reste en place après la clôture, que l’acheteur a confiance dans le modèle d’affaires sous-jacent et que les parties sont disposées à définir – de manière précise et équitable – les critères de mesure du succès.

Lorsque ces clauses sont utilisées par automatisme ou pour dissimuler des divergences fondamentales, elles entraînent fréquemment des litiges après la clôture et mettent à mal les relations entre les parties.

Ce que cela signifie pour les équipes responsables de l’opération et les conseils d’administration

Plutôt que de l’utiliser machinalement, les professionnels ayant un mandat de F&A doivent appréhender la clause d’indexation sur les bénéfices futurs dans son contexte et l’utiliser avec discernement. Que vous soyez la partie acheteuse ou la partie vendeuse, les discussions avec votre spécialiste des F&A au Canada devraient porter notamment sur les questions suivantes :

  • Utilisons-nous une clause d’indexation sur les bénéfices futurs à des fins incitatives ou de protection?
  • Quelles seront les répercussions de cette structure sur la culture et l’autonomie opérationnelle après la clôture?
  • La partie vendeuse peut-elle réellement influencer le résultat dans un contexte où la partie acheteuse a le contrôle?
  • Quelles seraient les répercussions d’un litige sur la clause, et comment serait-elle interprétée?

Ces questions sont loin d’être simples : elles touchent aux fondements mêmes de la stratégie d’opération, de la gouvernance et de la concrétisation de la valeur.

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Lorsqu’elles sont utilisées avec discernement, les clauses d’indexation sur les bénéfices futurs peuvent faciliter le rapprochement des intérêts, favoriser le rendement et combler les écarts d’évaluation, sans compromettre l’opération. Les juristes de BLG accompagnent leurs clients dans la structuration de ces instruments, afin qu’ils reflètent non seulement une rigueur juridique, mais aussi une intention stratégique. Besoin d’aide pour structurer vos opérations dans une optique de valeur à long terme, et non comme des solutions temporaires? Communiquez avec l’une des personnes-ressources ci-dessous.

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