une main qui tient une guitare

Perspectives

Budget fédéral 2023 : l’art d’augmenter les impôts sans augmenter les taux

Les mesures fiscales annoncées dans le budget fédéral 2023 (le « budget 2023 ») visent essentiellement les contribuables canadiens. En effet, les mesures destinées aux non-résidents du Canada sont relativement peu nombreuses. Le gouvernement semble très attentif à la manière dont l’économie canadienne réagit aux changements climatiques et propose plusieurs crédits d’impôt visant les technologies propres en réponse aux mesures extrêmement généreuses annoncées aux États-Unis l’an dernier. Les entreprises qui participent (ou espèrent participer) à l’économie verte sous une forme ou une autre devront examiner de près les critères d’admissibilité de ces mesures. En outre, les nouvelles mesures permettant la création de fiducies collectives des employés au Canada et limitant l’optimisation fiscale des transferts d’entreprise intergénérationnels abordent de manière substantielle les questions relatives à la planification de la relève. Les contribuables qui envisagent de transférer une entreprise familiale à un membre de leur famille devront se familiariser avec ces règles. En ce qui a trait aux revenus des particuliers, des changements importants visant à augmenter l’impôt minimum de remplacement (IMR) et à l’orienter davantage vers les personnes à revenu élevé s’ajoutent aux règles annoncées à l’automne 2022. Ces règles annonçaient notamment l’ajout d’un impôt sur les rachats d’actions par les sociétés publiques, une autre mesure inspirée des États-Unis. Diverses initiatives et annonces de moindre envergure figurent également dans le budget 2023, comme nous le verrons plus loin.

Mesures visant l’impôt sur le revenu des particuliers

Fiducies collectives des employés

Le budget 2023 propose de nouvelles règles facilitant l’utilisation des fiducies collectives des employés (FCE) au Canada pour acquérir et détenir des actions d’une entreprise à compter du 1er janvier 2024. Comme plus de 75 % des propriétaires de petites entreprises prévoient prendre leur retraite au cours de la prochaine décennie, les FCE pourraient être une option de succession intéressante.

Conditions d’admissibilité

Une fiducie est considérée comme une FCE s’il s’agit d’une fiducie irrévocable résidant au Canada et si, en tout temps :

  • La fiducie détient des actions d’entreprises admissibles au profit exclusif de toutes les personnes employées par une entreprise admissible et toute autre entreprise admissible qu’elle contrôle, à l’exclusion des employés qui détiennent d’importants intérêts économiques ou qui n’ont pas terminé une période de probation d’une durée raisonnable pouvant aller jusqu’à 12 mois; les particuliers et leurs personnes liées qui détiennent, ou détenaient avant la vente à une FCE, un important intérêt économique dans une entreprise admissible de la FCE ne seraient également pas considérés comme des bénéficiaires.
  • La participation des bénéficiaires est déterminée de la même manière, soit uniquement en fonction d’une application raisonnable des heures travaillées, de la période de service et de la rémunération.
  • Il est interdit à la fiducie d’agir dans l’intérêt d’un bénéficiaire (ou d’un groupe de bénéficiaires) au détriment d’un autre bénéficiaire (ou d’un groupe de bénéficiaires).
  • Chaque bénéficiaire a le même droit de vote dans l’ensemble des décisions et doit être une société de fiducie autorisée résidant au Canada ou une personne (autre qu’une fiducie) élue fiduciaire pour une période d’au plus cinq ans par les bénéficiaires âgés de plus de 18 ans; lorsqu’une entreprise existante est vendue à une FCE, les particuliers et les personnes qui leur sont liées qui détenaient des intérêts économiques importants dans l’entreprise existante avant la vente ne seraient pas en mesure de représenter plus de 40 % des fiduciaires de la FCE, des administrateurs du conseil d’administration d’une société agissant à titre de fiduciaire de la FCE ou des administrateurs de toute entreprise admissible de la FCE.

Une FCE serait tenue de détenir une participation majoritaire dans une ou plusieurs entreprises admissibles. La totalité, ou presque, des actifs d’une FCE doit être constituée d’actions d’entreprises admissibles. Une entreprise admissible est une société privée sous contrôle canadien qui doit remplir certaines conditions; la totalité ou presque de la juste valeur marchande de ses actifs doit en tout temps être attribuable à des actifs utilisés dans une entreprise exploitée activement au Canada, par exemple. Ce critère peut s’avérer difficile à respecter au fil du temps. De plus, une entreprise admissible ne doit pas exercer ses activités commerciales à titre de partenaire d’une société de personnes.

Traitement fiscal des FCE et paiements aux employés

La FCE serait une fiducie imposable. Par conséquent, les règles la visant seraient généralement les mêmes que celles visant les autres fiducies personnelles. Le revenu non réparti de la fiducie serait imposé au niveau de la FCE au taux d’imposition marginal supérieur du revenu des particuliers, tandis que le revenu d’une FCE distribué à ses bénéficiaires serait imposable au niveau des bénéficiaires, les dividendes conservant leur caractère. Une FCE ne serait pas autorisée à distribuer des actions d’entreprises admissibles à des bénéficiaires particuliers.

Un traitement fiscal favorable sera accordé aux FCE et aux propriétaires de l’entreprise vendue lors d’un « transfert d’entreprise admissible » grâce aux modifications suivantes apportées aux règles de la Loi de l’impôt sur le revenu :

  • Le budget propose de prolonger la période du calcul de la provision pour gains en capital de cinq à dix ans pour les transferts d’entreprise admissibles à une FCE, puisque l’on s’attend à ce que la vente à une FCE ait un délai de récupération plus long.
  • Le gouvernement suggère également d’instaurer une nouvelle exception aux règles sur les prêts aux actionnaires pour les FCE. Toutefois, si une FCE devait contracter un prêt auprès d’une entreprise admissible pour financer l’achat d’actions dans le cadre d’un transfert d’entreprise admissible, elle serait tenue, à ce moment, de conclure un accord de bonne foi en vue de rembourser le prêt dans un délai de 15 ans.
  • Enfin, le budget propose d’exonérer les FCE de l’obligation fiscale importante que représente la règle de présomption de disposition de 21 ans, leur permettant ainsi de conserver les actions au-delà de cette période. Si une fiducie ne satisfait plus les conditions pour être considérée comme une FCE, la règle des 21 ans serait rétablie jusqu’à ce que la fiducie les remplisse de nouveau.

Les transferts admissibles d’entreprise doivent respecter les critères suivants :

  • Un contribuable doit procéder à la disposition d’actions d’une entreprise admissible pour une contrepartie ne dépassant pas la juste valeur marchande.
  • Les actions doivent faire l’objet d’une disposition en faveur d’une fiducie qui est admissible à titre de FCE immédiatement après la vente ou d’une société détenue à 100 % par la FCE.
  • La FCE doit détenir une participation majoritaire dans l’entreprise admissible immédiatement après le transfert d’entreprise admissible.

Dans le budget 2023, le gouvernement a annoncé qu’il s’engageait à créer ces fiducies tout en consultant les intervenants afin d’éliminer les obstacles qui subsistent.

Impôt minimum de remplacement pour les particuliers à revenu élevé

Le budget 2023 fournit des précisions sur les changements proposés au régime de l’IMR, lesquels entreront en vigueur pour les années d’imposition qui commencent après 2023.
Les contribuables doivent calculer l’impôt dont ils sont redevables selon la méthode normale et selon l’IMR, puis payer le plus élevé des deux montants. Ils peuvent également être assujettis à un IMR provincial (généralement un certain pourcentage de l’IMR fédéral).

L’IMR visait autrefois à empêcher les particuliers d’abuser du traitement fiscal préférentiel accordé à certains types de revenus, de déductions ou de crédits afin de ne pas payer d’impôts ou d’en payer très peu.

Dans le budget 2023, le gouvernement propose :

  • d’élargir l’assiette fiscale en incluant une plus grande part des revenus des contribuables et en refusant diverses dépenses et déductions;
  • de réduire les crédits d’impôt qui peuvent être utilisés pour limiter l’IMR;
  • d’augmenter le taux de l’IMR de 15 % à 20,5 %;
  • d’augmenter le montant de l’exonération de l’IMR, le faisant passer de 40 000 $ à environ 173 000 $ pour 2024.

Assiette fiscale élargie

Le changement le plus surprenant est que seulement 50 % des nombreuses dépenses engagées pour gagner un revenu seront déductibles. Cela comprend les frais d’intérêts et les frais financiers engagés pour gagner un revenu de biens ainsi que les frais liés à l’emploi, autres que ceux engagés afin de gagner un revenu de commissions. Étant donné que l’IMR ne s’applique qu’aux particuliers et aux fiducies et que les sociétés continuent de bénéficier entièrement de nombreuses déductions et dépenses, ce changement pourrait encourager davantage de contribuables à transférer leurs activités d’investissement dans une société.

Crédits limités

Les organismes de bienfaisance pourraient voir leurs dons diminuer à la suite des nouvelles modifications de l’IMR. Afin d’éviter ou de réduire l’IMR, les particuliers avaient l’habitude de faire des dons importants à des organismes enregistrés au cours des années où ils réalisaient d’importants gains en capital. Comme seulement 50 % du crédit connexe sera accordé en vue de réduire l’IMR, certaines personnes pourraient modifier leurs habitudes en matière de dons de bienfaisance.

Augmentation de l’exonération et du taux de l’IMR

Le gouvernement propose d’augmenter l’exonération, passant de 40 000 $ à la borne inférieure de la quatrième tranche d’imposition fédérale. Selon l’indexation prévue pour l’année d’imposition 2024, il s’agirait d’un montant d’environ 173 000 $. Le montant de l’exonération serait indexé en fonction de l’inflation annuelle. En pratique, cela signifie qu’il n’y a plus d’impôt minimum pour toutes les personnes dont les revenus sont égaux ou inférieurs à 173 000 $. Les contribuables auront davantage intérêt à étaler leurs revenus sur plusieurs années afin d’éviter l’IMR.

Le tableau suivant compare l’IMR actuel, l’IMR proposé et le calcul normal de l’impôt sur le revenu :

IMR actuel

IMR proposé

Calcul normal de l’impôt sur le revenu

  • 80 % des gains en capital
  • 100 % des gains en capital
  • 50 % des gains en capital
  • De 50 % à 100 % des options d’achat d’actions des employés
  • 100 % des options d’achat d’actions des employés
  • De 50 % à 100 % des options d’achat d’actions des employés
  • Valeur au comptant des dividendes
  • Valeur au comptant des dividendes
  • Valeur majorée des dividendes
  • Aucun crédit d’impôt pour dividendes
  • Aucun crédit d’impôt pour dividendes
  • Aucun crédit d’impôt pour dividendes
  • 30 % de l’exonération cumulative des gains en capital
  • 30 % de l’exonération cumulative des gains en capital
  • 0 % de l’exonération cumulative des gains en capital
  • 0 % des gains en capital sur les dons de titres cotés en bourse
  • 30 % des gains en capital sur les dons de titres cotés en bourse
  • 0 % des gains en capital sur les dons de titres cotés en bourse
  • 100 % du crédit pour dons sous forme de titres
  • 50 % du crédit pour dons sous forme de titres
  • 100 % du crédit pour dons sous forme de titres
  • Déduction de 100 % pour la plupart des dépenses et des déductions
  • Déduction de 50 % pour de nombreuses dépenses et déductions
  • Déduction de 100 % pour la plupart des dépenses et des déductions
  • 100 % des crédits d’impôt non remboursables accordés en vue de réduire l’IMR
  • 50 % des crédits d’impôt non remboursables accordés en vue de réduire l’IMR
  • 100 % des crédits d’impôt non remboursables accordés en vue de réduire l’IMR
  • 100 % du crédit spécial pour impôt étranger accordé en vue de réduire l’IMR
  • 100 % du crédit spécial pour impôt étranger accordé en vue de réduire l’IMR (taux de 20,5 %)
  • 100 % du crédit spécial pour impôt étranger accordé en vue de réduire l’IMR (taux de 15 %)

Crédits refusés :

  • Crédit d’impôt pour contributions politiques
  • Crédit relatif à une société à capital de risque de travailleurs
  • Partie non remboursable des crédits d’impôt à l’investissement

Crédits refusés :

  • Crédit d’impôt pour contributions politiques
  • Crédit relatif à une société à capital de risque de travailleurs
  • Partie non remboursable des crédits d’impôt à l’investissement

Crédits accordés :

  • Crédit d’impôt pour contributions politiques
  • Crédit relatif à une société à capital de risque de travailleurs
  • Partie non remboursable des crédits d’impôt à l’investissement
  • Exonération : 40 000 $
  • Exonération : 173 000 $
  • Montant personnel de base : 15 000 $

 

Selon les nouvelles règles, 50 % des dépenses et des déductions suivantes seraient refusées aux fins du calcul de l’IMR :

  • Les frais liés à l’emploi, autre que ceux engagés afin de gagner un revenu de commissions
  • Les déductions pour les cotisations versées au Régime de pensions du Canada, au Régime de rentes du Québec et au régime d’assurance parentale provincial
  • Les frais de déménagement
  • Les frais de garde d’enfants
  • La déduction pour produits et services de soutien aux personnes handicapées
  • La déduction pour les indemnités pour accidents du travail
  • La déduction pour les prestations d’aide sociale
  • La déduction pour les paiements au titre du Supplément de revenu garanti et des allocations
  • La déduction pour le personnel des Forces armées canadiennes et des forces policières
  • Les frais d’intérêts et les frais financiers engagés pour gagner un revenu de biens
  • La déduction pour les pertes comme commanditaire d’autres années
  • Les pertes autres que des pertes en capital d’autres années
  • La déduction pour les habitants de régions éloignées

Les limites sur les dépenses liées aux productions cinématographiques, aux biens de location, aux avoirs miniers et aux abris fiscaux continueront à s’appliquer.

Transferts intergénérationnels d’entreprises

Un projet de loi émanant d’un député présenté au cours de la 43e législature (projet de loi C-208) a instauré une exception à l’article 84.1 de la Loi de l’impôt sur le revenu, en vigueur le 29 juin 2021, pour certains transferts d’actions de parents à des sociétés appartenant à leurs enfants ou petits-enfants.

Le budget 2023 propose de modifier les règles instaurées par ce projet de loi afin de s’assurer qu’elles ne s’appliquent que lorsqu’un véritable transfert intergénérationnel d’entreprise a lieu. Un véritable transfert d’actions intergénérationnel serait le transfert des actions d’une société (la société transférée) par une personne physique (l’auteur du transfert) à une autre société (la société acheteuse) lorsque plusieurs conditions sont remplies.

Les conditions existantes suivantes imposées par le projet de loi C-208 seraient maintenues :

  • Chaque action de la société transférée serait une « action admissible de petite entreprise » ou une « action du capital-actions d’une société agricole ou de pêche familiale », au moment du transfert.
  • La société acheteuse doit être contrôlée par une ou plusieurs personnes dont chacune est un enfant adulte de l’auteur du transfert (le sens d’« enfant » à ces fins comprendrait les petits-enfants, les enfants du conjoint, les conjoints des enfants, les nièces et neveux, et les petites-nièces et petits-neveux).

Le budget 2023 propose de faire preuve de souplesse dans le cadre des transferts intergénérationnels. Plus particulièrement, il est proposé que les contribuables qui souhaitent entreprendre un véritable transfert d’actions intergénérationnel puissent choisir de s’en remettre à l’une des deux options de transfert suivantes :

  • Un transfert d’entreprise intergénérationnel immédiat fondé sur des conditions de vente sans lien de dépendance (les parents transfèrent immédiatement le contrôle de droit et de fait et la majorité des actions ordinaires, puis transfèrent le solde de ces actions dans un délai maximal de trois ans).
  • Un transfert d’entreprise intergénérationnel progressif dont les règles sont plus souples et qui permet une transition sur cinq à dix ans.

Ces structures sont fondées sur les caractéristiques traditionnelles du gel successoral, qui nécessite habituellement qu’un parent cristallise la valeur de son intérêt économique dans une société afin de permettre à ses enfants de bénéficier de la croissance future pendant que l’intérêt économique fixe du parent est progressivement diminué par le rachat de l’intérêt du parent par la société.

Dans les deux cas, les parents doivent transférer la gestion de l’entreprise à la nouvelle génération dans un délai raisonnable en fonction des circonstances particulières (avec un délai de sûreté de 36 mois). Les parties seraient tenues de faire un choix conjoint quant au type de transfert, en plus de satisfaire à plusieurs exigences continues. Le budget 2023 propose également une provision pour gains en capital de dix ans pour les transferts qui remplissent ces conditions.

Mesures visant l’impôt sur le revenu des sociétés

Règle générale anti-évitement

Le budget 2023 propose les modifications suivantes à la règle générale anti-évitement (RGAÉ) de la Loi de l’impôt sur le revenu :

  • L’ajout d’un préambule qui prévoit des règles d’interprétation de la RGAÉ.
  • L’assouplissement des exigences nécessaires pour qu’une transaction soit considérée comme une « opération d’évitement » susceptible de donner lieu à l’application de la RGAÉ.
  • L’ajout d’une règle rendant un manque de « substance économique » potentiellement pertinent pour déterminer s’il y a eu « abus ».
  • L’instauration d’une pénalité pour les opérations assujetties à la RGAÉ.
  • La prolongation de trois ans de la période de nouvelle cotisation en vue de l’application de la RGAÉ.

Le gouvernement recueillera les points de vue des parties prenantes sur ces propositions jusqu’au 31 mai 2023. Après cette période de consultation, il a l’intention de publier des propositions législatives révisées et d’annoncer la date d’entrée en vigueur des modifications.

Préambule

L’ajout d’un préambule permettrait, d’une part, d’aborder des questions d’interprétation et, d’autre part, de faire en sorte que la RGAÉ s’applique comme prévu. Plus précisément, il traite des trois points suivants (tels que décrits dans l’ébauche des modifications proposées) :

Préambule

[245](0.1) Le présent article de la présente loi contient la disposition générale anti-évitement, laquelle :

a) s’applique pour refuser les avantages fiscaux des opérations d’évitement qui entraînent directement ou indirectement un abus des dispositions de la présente loi (ou de l’un des textes figurant aux sous-alinéas (4)a)(ii) à (v)) ou un abus eu égard à ces dispositions lues dans leur ensemble tout en permettant aux contribuables d’obtenir les avantages fiscaux visés par les dispositions applicables;

b) établit un équilibre entre, à la fois :

i) le besoin de certitude des contribuables dans la planification de leurs affaires,

ii) la responsabilité du gouvernement du Canada en matière de protection de l’assiette fiscale et d’équité du régime fiscal;

c) peut s’appliquer qu’une stratégie fiscale ait été ou non prévue.

Norme d’une opération d’évitement

À l’heure actuelle, pour qu’une transaction ou une série de transactions constituent une « opération d’évitement » susceptible de donner lieu à l’application de la RGAÉ, l’obtention d’un avantage fiscal doit en être l’« objet principal ». Le budget 2023 propose que la définition d’« opération d’évitement » soit modifiée pour qu’une opération ou une série d’opérations puissent être considérées comme une opération d’évitement si « l’un de [leurs] principaux objets » est l’obtention d’un avantage fiscal. Cette modification vise à étendre le critère d’applicabilité de la RGAÉ aux opérations dont l’évitement fiscal est un objectif important, même s’il n’en est pas l’« objet principal », mais pas à celles où l’impôt est simplement une considération (selon le gouvernement).

Substance économique

La jurisprudence actuelle n’accorde qu’un rôle limité à la substance économique lorsqu’il s’agit de déterminer l’applicabilité de la RGAÉ. Le budget 2023 propose que la « substance économique » soit considérée à l’étape de l’« abus » de l’analyse de la RGAÉ, soi-disant parce que l’«objectif initial » de la RGAÉ est d’exiger une substance économique en plus de la conformité littérale au texte de la Loi de l’impôt sur le revenu. Dans la mesure où une opération manque de substance économique, la nouvelle règle s’appliquerait. Autrement, la jurisprudence actuelle sur l’abus continuerait de prévaloir.

Selon les modifications proposées, un manque de substance économique ne serait pas toujours synonyme d’opération abusive, mais son absence sera considérée comme un facteur indiquant la présence d’un stratagème d’évitement fiscal abusif. Comme c’est actuellement le cas, il sera nécessaire de déterminer l’objet et l’esprit des dispositions ou des mécanismes invoqués. Dans les cas où les résultats fiscaux recherchés reflètent l’objet des dispositions ou du mécanisme invoqués, aucun évitement fiscal abusif ne serait reconnu même dans les cas où une substance économique serait manquante.

De plus, les modifications prévoient une liste non exhaustive d’indicateurs permettant de déterminer si une opération ou une série d’opérations manquent de substance économique. Dans de nombreux cas, l’existence d’un ou de plusieurs de ces indicateurs serait fortement révélatrice d’une opération manquant de substance économique. Ces indicateurs sont :

  • déterminer si une opération présente un potentiel de bénéfice avant impôt;
  • déterminer si l’opération a abouti à un changement de situation économique;
  • déterminer si l’opération est effectuée entièrement (ou presque entièrement) pour des raisons fiscales.

Par exemple, le transfert de fonds par un particulier d’un compte imposable à un compte d’épargne libre d’impôt est une transaction manquant de substance économique qui n’est pas considérée comme abusive. Bien qu’un tel transfert soit effectué entièrement pour des raisons fiscales, il n’entraîne aucun changement de situation économique et ne présente pas un potentiel de bénéfice avant impôt. Il ne s’agit donc pas d’un abus des dispositions pertinentes de la Loi de l’impôt sur le revenu : le particulier agit précisément de la manière prévue par le Parlement.

Le gouvernement affirme que sa proposition ne supplanterait pas l’approche générale en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu fédérale, laquelle est axée sur la forme juridique d’un arrangement. En particulier, elle n’exigerait pas une enquête pour déterminer ce qu’est réellement la substance économique d’une opération (p. ex., si un instrument financier donné est, essentiellement, une dette ou des capitaux propres). Elle exigerait plutôt la considération d’un manque de substance économique dans la détermination d’un évitement fiscal abusif.

Pénalité

Le budget 2023 propose d’instaurer une pénalité pour les opérations assujetties à la RGAÉ, équivalant à 25 % du montant de l’avantage fiscal. Celle-ci ne s’applique pas aux attributs fiscaux qui n’ont pas encore été utilisés pour réduire les impôts. Elle ne concernera que les avantages fiscaux découlant de transactions qui n’ont pas été déclarées à l’Agence du revenu du Canada (ARC) selon le formulaire prescrit. Elle pourrait être évitée en cas de divulgation de l’opération à l’ARC faite expressément à cette fin ou dans le cadre des règles de divulgation obligatoire proposées.

Prolongation de la période de nouvelle cotisation

Le budget 2023 propose de prolonger de trois ans la période normale de nouvelle cotisation relativement aux cotisations liées à la RGAÉ pour les transactions non divulguées. Si l’opération est déclarée à l’ARC, la période normale de nouvelle cotisation s’appliquera.

Commentaire

Il est relativement surprenant que le gouvernement ait choisi le budget 2023 pour proposer ces modifications à la RGAÉ, puisqu’ils font pencher encore plus la balance en sa faveur dans les cas où elle s’applique. Le document de discussion sur cet enjeu qu’il a publié en août 2022 n’expliquait pas exactement pourquoi il désirait apporter de telles modifications législatives. Avant d’annoncer ces propositions législatives, le gouvernement aurait dû clarifier certaines questions, notamment les affaires qu’il a perdues, mais qu’il aurait selon lui dû gagner (et pourquoi). Ceci aurait éventuellement permis une recherche de solutions concrètes plus informée. Il a plutôt décidé d’aller de l’avant avec des modifications législatives qui s’écartent considérablement de la politique fiscale actuelle.

Par exemple, il n’explique pas pourquoi les pénalités devraient s’appliquer chaque fois qu’il invoque la RGAÉ avec succès, indépendamment des règles actuelles prévoyant déjà des pénalités en cas de négligence grave (l’ARC devra s’attendre à recevoir de très nombreux avis de production pour des transactions bénignes, qui serviront à se prémunir contre les pénalités prévues par la RGAÉ). La nouvelle règle proposée sur la substance économique est particulièrement inquiétante à cet égard. Nonobstant la référence au fait que l’exigence de substance économique fait partie de l’« objectif initial » de la RGAÉ, les notes explicatives initiales accompagnant la RGAÉ n’en font qu’à peine mention. L’ajout d’une telle exigence à l’échiquier change considérablement les règles du jeu. La définition de l’expression « substance économique » peut varier d’une personne à l’autre. Une modification législative prévoyant que son absence pourrait éventuellement indiquer la présence d’une « mauvaise » transaction n’est pas justifiée et risque d’encourager l’ARC à étendre la portée de la RGAÉ au-delà de son champ d’application prévu. Le gouvernement a tiré des conclusions erronées à propos des affaires touchant la RGAÉ dans lesquelles il n’a pas obtenu gain de cause; il devrait plutôt se concentrer sur les propositions formulées dans son document de discussion afin de mieux expliquer la logique des dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu. Il est probable que d’autres annonces soient faites à ce sujet avant la date limite du 31 mai.

Impôt sur les rachats de capitaux propres

Comme il avait été annoncé précédemment, le budget 2023 propose un impôt de 2 % sur la valeur nette des rachats d’actions (et d’unités) par divers types de sociétés publiques au Canada (à l’exception des fiducies de fonds communs de placement), entre autres des sociétés de placement immobilier, des fiducies ou des sociétés de personnes intermédiaires de placement déterminées (généralement d’anciennes fiducies de revenu) et d’autres fiducies et sociétés de personnes. Il s’appliquerait aux rachats de capitaux propres effectués à compter du 1er janvier 2024 et serait égal à 2 % de la valeur nette des capitaux propres rachetés par une entité (c’est-à-dire les actions ou les unités de la société, de la fiducie ou de la société de personnes), définie comme la juste valeur marchande des capitaux propres rachetés moins la juste valeur marchande des capitaux propres émis de la trésorerie. Cette « règle de compensation » s’appliquerait chaque année, correspondant à l’année d’imposition de l’entité. Les offres des émetteurs dans le cours normal de leurs activités et leurs offres importantes constitueraient un rachat de capitaux propres pour l’application de la règle.

Certaines exceptions à la règle de compensation sont proposées. Plus particulièrement, les opérations suivantes ne seraient pas considérées comme une émission ou un rachat de capitaux propres :

  • L’émission ou l’annulation d’actions et d’unités privilégiées de type dette, c’est-à-dire des actions et des unités ayant un dividende fixe et un droit de rachat.
  • L’émission ou l’annulation d’actions ou d’unités dans le cadre de certaines réorganisations et acquisitions d’entreprises, notamment des fusions, liquidations et échanges d’actions.

L’impôt ne s’appliquerait pas à une entité au cours d’une année d’imposition si elle a racheté moins de 1 M$ de capitaux propres au cours de cette année d’imposition (calculé au prorata pour les années d’imposition courtes), calculé selon la valeur brute.

L’acquisition de capitaux propres par certaines sociétés affiliées d’une entité serait réputée avoir été un rachat de capitaux propres par l’entité elle-même. Certaines exceptions à cette règle sont proposées, y compris celles qui visent à faciliter certaines ententes de rémunération fondées sur les capitaux propres et les acquisitions effectuées par des courtiers en valeurs mobilières inscrits dans le cours normal des affaires.

Un impôt similaire est prélevé aux États-Unis au taux de 1 %. En vertu des lignes directrices publiées par l’Internal Revenue Service dans son avis « Notice 2023-2 » publié le 27 décembre 2023, cet impôt peut aussi s’appliquer aux rachats d’actions par des sociétés publiques étrangères (notamment canadiennes) si une société affiliée des États-Unis finance de quelconque manière (y compris au moyen de distributions, de prêts ou d’apports en capital) l’acquisition ou le rachat d’actions d’une société publique. Les règles canadiennes proposées dans le budget 2023 ne semblent pas indiquer qu’il faudra imposer une société canadienne affiliée à une société publique américaine qui finance un rachat d’actions pour cette dernière.

Déduction pour dividendes reçus par des institutions financières

Le budget 2023 cible les déductions que demandent les institutions financières pour des dividendes reçus sur des actions d’autres sociétés assujetties aux règles d’évaluation à la valeur du marché (c’est-à-dire lorsqu’une institution financière détient moins de 10 % des voix ou de la valeur de la société résidant au Canada qui a émis les actions de portefeuille). Le budget 2023 propose également, pour les fins de l’application de cette nouvelle disposition, qu’une action (sauf une action d’une institution financière) qui est un « bien à évaluer » d’une société à un moment donné d’une année d’imposition soit réputée être un « bien évalué à la valeur du marché » de la société pour l’année. Cela vise à harmoniser le traitement des dividendes et des gains considérés comme des revenus sur les actions de portefeuille en vertu des règles d’évaluation à la valeur du marché. Cette mesure, qui aura pour effet de refuser, après 2023, la déduction pour dividendes reçus par les institutions financières sur les actions qui constituent des biens évalués à la valeur du marché, devrait générer 3,15 G$ de revenus supplémentaires au cours des quatre prochaines années.

Transition énergétique

Le budget 2023 propose d’introduire ou d’élargir diverses mesures afin d’appuyer les stratégies gouvernementales en matière de transition énergétique :

Électricité propre

  • Crédit d’impôt à l’investissement dans l’électricité propre : Le budget 2023 propose un crédit d’impôt remboursable de 15 % s’appliquant aux investissements admissibles dans : a) les systèmes de production d’électricité sans émissions (de sources éoliennes ou solaires); b) la production d’électricité au gaz naturel réduite; c) les systèmes fixes de stockage de l’électricité exploités sans combustibles fossiles; d) l’équipement pour le transport de l’électricité entre les provinces et les territoires.
  • Crédit d’impôt à l’investissement dans les technologies propres – Énergie géothermique : L’Énoncé économique de l’automne de 2022 a proposé l’établissement d’un crédit d’impôt remboursable de 30 % pour les entreprises qui investissent dans des biens admissibles qui sont acquis et deviennent prêts à être mis en service à compter de la date du dépôt du budget 2023. Le budget 2023 propose d’élargir l’admissibilité à ce crédit d’impôt en vue d’inclure l’équipement utilisé principalement pour produire de l’électricité et/ou de l’énergie thermique à partir de systèmes géothermiques qui sont admissibles à la catégorie 43.1 de l’annexe II du Règlement de l’impôt sur le revenu.

Fabrication et extraction de minéraux critiques

  • Crédit d’impôt à l’investissement dans la fabrication de technologies propres : Le budget 2023 propose d’introduire un crédit d’impôt remboursable pour les biens amortissables utilisés uniquement ou principalement dans le cadre d’activités liées à la fabrication et à la transformation de certaines technologies propres, notamment : a) la fabrication de certains matériaux liés à l’énergie renouvelable (solaire, éolienne, hydraulique ou géothermique); b) la fabrication de matériel lié à l’énergie nucléaire; c) la transformation ou le recyclage de combustibles nucléaires et de l’eau lourde; d) la fabrication de barres de combustible nucléaire; e) la fabrication de matériel de stockage de l’énergie électrique utilisé pour fournir du stockage à l’échelle du réseau ou d’autres services auxiliaires; f) la fabrication de matériel pour les systèmes de thermopompe à air et de pompe géothermique; g) la fabrication de véhicules à zéro émission, y compris la conversion de véhicules routiers; h) la fabrication de batteries, de piles à combustible, de systèmes de recharge et de postes de ravitaillement en hydrogène pour les véhicules à zéro émission; i) la fabrication de matériel utilisé pour produire de l’hydrogène par électrolyse; j) la fabrication ou la transformation de composants en amont, de sous-ensembles et de matériaux, à condition que la production soit conçue à une fin particulière ou exclusivement pour faire partie intégrante d’autres activités de fabrication ou de transformation de technologies propres admissibles, comme les matériaux anodiques et cathodiques utilisés pour les batteries de véhicules électriques.

Sera aussi admissible l’équipement utilisé dans le cadre d’activités d’extraction et de certaines activités de transformation liées à six minéraux critiques indispensables aux chaînes d’approvisionnement des technologies propres, soit le lithium, le cobalt, le nickel, le graphite, le cuivre et les éléments des terres rares.

  • Actions accréditives et crédit d’impôt pour l’exploration de minéraux critiques – Lithium provenant de saumure : Le budget 2023 propose d’inclure le lithium provenant de saumure en tant que ressource minérale pour les fins du régime d’actions accréditives et du crédit d’impôt pour l’exploration de minéraux critiques.

Production d’hydrogène et captage de carbone

  • Crédit d’impôt à l’investissement dans l’hydrogène propre : Ce crédit d’impôt pourra être demandé pour l’achat et l’installation d’équipement utilisé dans le cadre de projets qui produisent la totalité, ou presque, de leur hydrogène : a) par électrolyse; b) à partir de gaz naturel (pourvu que les émissions soient atténuées par des activités de captage et de stockage de carbone). Les taux suivants s’appliqueraient : a) 40 % pour une intensité carbonique (IC) inférieure à 0,75 kg; b) 25 % pour une IC supérieure ou égale à 0,75 kg, mais inférieure à 2 kg; c) 15 % pour une IC supérieure ou égale à 2 kg, mais inférieure à 4 kg. Ces taux seront déterminés sans tenir compte du CO2 produit qui est capté et stocké ou utilisé, ou de l’excédent d’électricité qui pourrait être vendu au réseau électrique.
  • Crédit d’impôt à l’investissement pour le captage, l’utilisation et le stockage du carbone (CUSC) : Le budget 2022 a proposé un crédit d’impôt à l’investissement remboursable pour le CUSC qui serait offert aux entreprises engageant des dépenses admissibles à compter du 1er janvier 2022. Le budget 2023 propose de rendre admissible à ce crédit d’impôt et de traiter comme de l’équipement de captage de carbone l’équipement à double usage qui produit de la chaleur et/ou de l’énergie ou qui utilise de l’eau, et qui est utilisé pour le CUSC ainsi que pour un autre procédé.

Pour chacun des crédits susmentionnés, il existe d’autres exigences et détails à prendre en compte; il est important de les examiner, tout comme les dates de début et de fin de l’allocation des crédits.

Exigences en matière de main-d’œuvre

Le gouvernement a annoncé, dans son Énoncé économique de l’automne de 2022, son intention d’intégrer des exigences en matière de salaire en vigueur et à l’égard des apprentis (appelées ensemble les « exigences en matière de main-d’œuvre ») aux crédits d’impôt à l’investissement dans les technologies propres et l’hydrogène propre proposés. Le gouvernement propose également que ces exigences s’appliquent aux crédits d’impôt à l’investissement dans l’électricité propre et le CUSC. Les exigences s’appliqueraient au travail exécuté à compter du 1er octobre 2023. Le gouvernement a annoncé souhaiter recevoir de la rétroaction dans le cours de la préparation des propositions législatives préliminaires. Le budget 2023 donne par ailleurs de plus amples renseignements sur les exigences en matière de main-d’œuvre concernant :

  • Le salaire en vigueur – Cette exigence veut que la rémunération totale des travailleurs soit équivalente ou supérieure au salaire indiqué dans la convention collective applicable.
  • Les heures travaillées par les apprentis – Cette exigence veut qu’au moins 10 % des heures totales travaillées par les gens de métier soient effectuées par des apprentis inscrits dans les métiers désignés Sceau rouge.

Mesures visant la fiscalité internationale

Le budget 2023 ne propose aucune nouvelle mesure visant la fiscalité internationale. Plus précisément, le budget 2023 réaffirme l’engagement du gouvernement à mettre en œuvre le premier ensemble de propositions législatives publiées en avril 2022 s’attaquant aux dispositifs hybrides transfrontaliers, mais ne contient aucune référence au deuxième ensemble de propositions attendues concernant les dispositifs hybrides transfrontaliers utilisés par les entités hybrides.

Le gouvernement a en outre renouvelé son engagement à exécuter son plan à deux piliers pour la réforme fiscale internationale convenue en 2021 par les membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et du Groupe des 20 (G20). Le pilier 1 traite de la numérisation de l’économie et le pilier 2 propose un régime d’imposition minimum mondial. Si le cadre du pilier 1 n’entre pas en vigueur le 1er janvier 2024, le gouvernement compte aller de l’avant avec son projet de taxe sur les services numériques, laquelle serait rétroactive à janvier 2022. Au cours des prochains mois, le gouvernement a l’intention de déposer un projet de loi relatif à certaines portions du régime d’imposition minimum mondial du pilier 2 dont les dispositions entreraient en vigueur à compter des exercices financiers suivant le 30 décembre 2023.

Mesures visant les taxes de vente et d’accise

Assurer le traitement de la TPS/TVH des services de compensation de cartes de paiement

Le budget 2023 propose de modifier la définition de « service financier » aux fins de la TPS/TVH afin d’en exclure les services de compensation relatifs aux cartes de paiement rendus par un exploitant de réseaux de cartes de paiement, afin de s’assurer que ces services sont assujettis à la TPS/TVH. Cette modification vise à concorder avec une décision judiciaire récente qui a conclu que la TPS/TVH ne s’applique pas aux fournitures de ces services.

Les exploitants de réseaux de cartes de paiement – terme défini dans la Loi sur les réseaux de cartes de paiement englobant tous les grands réseaux de cartes de paiement – entretiennent des systèmes de compensation relativement aux cartes de paiement (cartes de crédit, de débit et de paiement) et fournissent des services de compensation pour les cartes de paiement (p. ex., les services de traitement de paiement et les services de messagerie) aux participants à ces systèmes (p. ex., un émetteur de cartes de paiement, comme une banque). La modification proposée s’appliquera aux services de compensation relatifs aux cartes de paiement rendus par un exploitant de réseaux de cartes de paiement rendus aux termes d’une convention portant sur :

  • un service relativement à l’autorisation d’une opération relative à l’argent, un compte, une pièce justificative de carte de crédit ou de paiement ou un effet financier;
  • un service de compensation ou de règlement relativement à l’argent, un compte, une pièce justificative de carte de crédit ou de paiement ou un effet financier;
  • un service rendu conjointement avec un service visé aux points ci-dessus.

La modification proposée s’appliquera généralement à toute contrepartie payée ou exigible pour le service après le jour du dépôt du budget 2023.

Le gouvernement propose également de permettre à l’ARC d’établir une cotisation, une nouvelle cotisation ou une cotisation supplémentaire à l’égard de tout montant à payer ou à verser par une personne conformément à la modification proposée pour la définition de service financier au plus tard le dernier en date du jour qui suit d’un an la date de sanction royale de la législation et le dernier jour de la période de cotisation prévue par la Loi sur la taxe d’accise, qui accorde généralement quatre ans à l’ARC.

Droits d’accise sur l’alcool

Le budget 2023 propose de temporairement plafonner l’ajustement inflationniste des taux du droit d’accise applicables à la bière, aux spiritueux et au vin à 2 %, pour un an seulement, à compter du 1er avril 2023. La mesure proposée entrerait en vigueur le 1er avril 2023.

Taxation du cannabis – Versements trimestriels des droits

Il est proposé dans le budget 2023 de permettre à tous les producteurs de cannabis titulaires d’une licence de verser des droits d’accise sur une base trimestrielle plutôt que sur une base mensuelle, à compter du trimestre qui débute le 1er avril 2023.

Droit pour la sécurité des passagers du transport aérien (DSPTA)

Le budget 2023 propose d’accorder à l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien un financement de 1,8 G$ sur cinq ans, à compter de 2023-2024, pour maintenir et rehausser son niveau de service, raccourcir le temps d’attente au contrôle de sécurité et renforcer les mesures de sûreté dans les aéroports. Pour soutenir le financement de cette proposition, le budget 2023 suggère d’augmenter les taux du DSPTA de 32,85 %. Les taux du DSPTA ont été augmentés la dernière fois en 2010, moment où ils ont été augmentés de 52,4 %.

Les nouveaux taux du DSPTA proposés s’appliqueront aux services de transport aérien qui comprennent un embarquement assujetti à partir du 1er mai 2024, et pour lesquels un paiement est effectué à partir de cette date. En ce qui concerne les vols transfrontaliers et internationaux, le DSPTA ne s’applique généralement qu’aux vols qui quittent le Canada. Les gouvernements étrangers peuvent imposer des droits pour la sécurité semblables pour les voyages de retour, mais ces droits ne sont pas concernés par la présente proposition.

Autres mesures

Autres mesures visant l’impôt sur le revenu des particuliers

  • Conventions de retraite (CR) : Le budget 2023 propose de modifier certains règlements relativement aux régimes de CR sans capitalisation (soit des conventions qui ne sont pas préfinancées au moyen de cotisations, pour lesquelles les employeurs paient les prestations à partir des revenus de sociétés). Avec cette modification, les frais ou primes payés aux fins de garantie ou de renouvellement d’une lettre de crédit ou d’un cautionnement d’une CR ne seront pas assujettis à l’impôt remboursable en vertu de la partie XI.3 de la Loi de l’impôt sur le revenu.
  • Régimes enregistrés d’épargne-études (REEE) : Le budget 2023 propose de modifier la Loi de l’impôt sur le revenu afin que les modalités d’un REEE puissent permettre des retraits de paiements d’aide aux études (PAE) pouvant atteindre 8 000 $ (auparavant 5 000 $) pour les 13 premières semaines consécutives d’inscription pour les bénéficiaires inscrits à temps plein et jusqu’à concurrence de 4 000 $ (auparavant 2 500 $) par période de 13 semaines pour les bénéficiaires inscrits à temps partiel.
  • Régimes enregistrés d’épargne-invalidité (REEI) : Une mesure temporaire permet à un membre de la famille admissible, qui est un parent, un époux ou un conjoint de fait, d’ouvrir un REEI et d’être titulaire du régime pour un adulte dont la capacité à conclure un contrat de REEI est mise en doute et qui n’a pas de représentant légal. Le budget 2023 propose également de prolonger de trois ans la mesure pour les membres de la famille admissibles jusqu’en 2026 et d’élargir la définition de membre de la famille admissible afin d’inclure un frère ou une sœur du bénéficiaire qui est âgé de 18 ans ou plus.
  • Remboursement pour l’épicerie : Le budget 2023 propose d’instaurer une augmentation du montant maximal du crédit pour la taxe sur les produits et services (TPS) pour janvier 2023 – qui aide à atténuer les répercussions de la TPS sur les particuliers et les familles à revenu faible ou modeste – qui serait connu en tant que le Remboursement pour l’épicerie. Les particuliers admissibles recevraient un montant supplémentaire du crédit pour la TPS équivalant au double du montant reçu pour janvier.
  • Déduction pour dépenses d’outillage des gens de métier : Le budget 2023 propose de doubler la déduction maximale du revenu d’emploi pour dépenses d’outillage des gens de métier, passant de 500 $ à 1 000 $, à compter de l’année d’imposition 2023.
  • Partage de renseignements confidentiels sur les contribuables aux fins du Régime canadien de soins dentaires : Afin de permettre à Santé Canada et à Emploi et Développement social Canada d’avoir accès aux renseignements confidentiels sur les contribuables nécessaires à la prestation du Régime canadien de soins dentaires permanent, le budget 2023 propose de modifier la Loi de l’impôt sur le revenu, la Loi sur la taxe d’accise et la Loi de 2001 sur l’accise afin de donner à l’ARC le pouvoir législatif de communiquer des renseignements confidentiels sur les contribuables.
  • Production automatisée des déclarations de revenus : En 2018, afin de faire augmenter le nombre de contribuables à faible revenu qui produisent leur déclaration de revenus, l’ARC a lancé le service Produire ma déclaration, par lequel elle envoie aux Canadiens admissibles une invitation à produire automatiquement leur déclaration de revenus par téléphone. Le budget 2023 annonce que le nombre de personnes admissibles à ce service passera à deux millions d’ici 2025, soit presque le triple du nombre actuel. De plus, le budget 2023 annonce que l’ARC mettra à l’essai un nouveau service de production automatique qui aidera les personnes vulnérables qui ne produisent pas leur déclaration de revenus actuellement à recevoir les prestations auxquelles elles ont droit.
  • Trop-payés des prestations de soutien liées à la COVID-19 : Le budget 2023 propose d’accorder à Emploi et Développement social Canada un financement de 53,8 M$ en 2022-2023 pour appuyer les activités d’intégrité relatives aux trop-payés des soutiens au revenu d’urgence liés à la COVID-19 et d’aider l’ARC à recouvrer les paiements en trop. Nous croyons qu’il s’en suivra une augmentation des vérifications; nous recommandons aux personnes qui ont reçu ces prestations de se tenir préparées en s’assurant que tous leurs documents connexes sont à jour.

Traitement des caisses de crédit aux fins de l’impôt sur le revenu et de la TPS/TVH

Le budget 2023 propose de modifier la définition de « caisse de crédit » de la Loi de l’impôt sur le revenu pour tenir compte de la façon dont les caisses de crédit fonctionnent actuellement, soit en éliminant le critère quant aux revenus qui exclut les caisses de crédit dont 10 % des revenus proviennent de sources autres que certaines sources désignées (comme le revenu d’intérêts découlant d’activités liées à des prêts). La modification s’appliquerait relativement aux années d’imposition d’une caisse de crédit se terminant après 2016.

Comptabilité publique provinciale

Dans un rapport de novembre 2022, la vérificatrice générale de l’Ontario a fait état de difficultés dans la réalisation de son audit des Comptes publics de l’Ontario en raison de son accès limité aux données des contribuables utilisées pour estimer les revenus provinciaux tirés de l’impôt sur le revenu des sociétés. Le gouvernement fédéral a annoncé qu’il collaborera avec le gouvernement de l’Ontario pour trouver des solutions viables à ce problème.

Mise en place d’un registre fédéral public sur la propriété effective

Le gouvernement s’est engagé, dans le budget 2022, à mettre en œuvre d’ici la fin de 2023 un registre public et consultable de renseignements sur la propriété effective des sociétés de régime fédéral. Ce registre inclura les sociétés régies par la Loi canadienne sur les sociétés par actions, et il pourra être élargi pour permettre l’accès aux données sur la propriété effective détenues par les provinces et les territoires qui acceptent de participer à un registre national.

Bien qu’une première série de modifications à la Loi canadienne sur les sociétés par actions ait reçu la sanction royale en juin 2022, d’autres modifications sont nécessaires pour mettre en œuvre un registre sur la propriété effective. Le gouvernement apporte d’autres modifications à la Loi canadienne sur les sociétés par actions et à d’autres lois, dont la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes et la Loi de l’impôt sur le revenu, afin de mettre en œuvre un registre public de renseignements sur la propriété effective par l’entremise du projet de loi C-42.

Le gouvernement a annoncé qu’il continuera d’appeler les gouvernements provinciaux et territoriaux à faire progresser une démarche d’ensemble de portée nationale sur la transparence de la propriété effective pour intensifier la lutte contre le blanchiment d’argent, l’évasion fiscale et le financement du terrorisme.

Examen du Programme d’encouragements fiscaux pour la recherche scientifique et le développement expérimental (RSDE)

Dans le budget 2022, le gouvernement a annoncé son intention d’examiner le programme de RSDE pour s’assurer qu’il offre un soutien adéquat et améliore le développement, le maintien et la commercialisation de la propriété intellectuelle. Il envisagera notamment d’adopter un régime privilégié des brevets. Le budget 2023 confirme que le ministère des Finances poursuivra ses consultations auprès des intervenants au sujet des prochaines étapes dans les mois à venir.

Mesures annoncées antérieurement

Le budget 2023 confirme l’intention du gouvernement d’aller de l’avant avec les mesures fiscales et autres mesures ci-dessous annoncées antérieurement, comme elles ont été modifiées afin de tenir compte des consultations et des délibérations qui ont eu lieu depuis leur publication :

  • Propositions législatives rendues publiques le 3 novembre 2022 concernant la Restriction des dépenses excessives d’intérêts et de financement et les Règles de déclaration à l’intention des exploitants de plateformes numériques.
  • Mesures fiscales annoncées dans l’Énoncé économique de l’automne de 2022, le 3 novembre 2022, pour lesquelles les propositions législatives n’ont pas encore été publiées, notamment : le versement anticipé automatique de l’Allocation canadienne pour les travailleurs; le crédit d’impôt à l’investissement dans les technologies propres; l’élargissement de la règle sur les reventes précipitées de biens immobiliers résidentiels aux cessions de contrats de vente.
  • Propositions législatives rendues publiques le 9 août 2022, notamment en ce qui concerne les mesures suivantes :
    • Emprunt par les régimes de retraite à prestations déterminées
    • Exigences en matière de déclaration pour les régimes enregistrés d’épargne-retraite (REER) et les fonds enregistrés de revenu de retraite (FERR)
    • Correction des erreurs reliées aux cotisations à des régimes de retraite à cotisations enregistrés
    • Crédit d’impôt à l’investissement pour les activités de CUSC
    • Opérations de couverture et ventes à découvert par les institutions financières canadiennes
    • Sociétés privées sous contrôle canadien en substance
    • Règles de divulgation obligatoire
    • Transmission électronique et certification des déclarations de revenus et de renseignements
    • Sommes relatives aux militaires et vétérans des Forces armées canadiennes
    • Autres modifications techniques relatives à la Loi de l’impôt sur le revenu et au Règlement de l’impôt sur le revenu proposées le 9 août 2022
    • Propositions législatives et réglementaires restantes concernant la TPS/TVH, les droits d’accises et d’autres taxes et redevances annoncées le 9 août 2022
  • Propositions législatives publiées le 29 avril 2022 en ce qui concerne les dispositifs hybrides.
  • Propositions législatives rendues publiques le 4 février 2022 concernant le traitement du minage de cryptoactif sous le régime de la TPS/TVH.
  • Propositions législatives déposées dans un Avis de motion de voies et moyens le 14 décembre 2021 en vue d’introduire la Loi de la taxe sur les services numériques.
  • Consultation sur les prix de transfert annoncée dans le budget 2021.
  • Mesure d’impôt sur le revenu annoncée le 20 décembre 2019 visant à prolonger d’un an la période de maturation des fiducies pour athlètes amateurs arrivant à échéance en 2019, la faisant passer de huit à neuf ans.
  • Mesures confirmées dans le budget 2016 en ce qui concerne le choix des coentreprises en matière de TPS/TVQ.

En outre, le budget 2023 réaffirme l’engagement du gouvernement à aller de l’avant, au besoin, avec les modifications techniques visant à accroître la certitude et l’intégrité du régime fiscal.

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