Le 17 avril 2025, le Bureau du représentant américain au commerce (l’« USTR ») a publié un avis de mesure très attendu portant sur les frais qui seront imposés aux navires de construction chinoise accostant dans les ports américains, entre autres mesures commerciales visant la République populaire de Chine. Il y avait une autre audience le 19 mai 2025, mais elle ne concernait que de nouveaux droits de douane proposés sur les grues de quai et les équipements de manutention de marchandises chinois.
Les mesures visant les navires chinois ont fait grand bruit et ont semé l’inquiétude chez les acteurs du transport maritime du monde entier, y compris les armateurs et exploitants, les affréteurs et les chargeurs canadiens.
De nombreux armateurs canadiens exploitent des navires construits en Chine en raison de leur disponibilité sur le marché et de leur coût relativement faible. Les frais initialement proposés, qui s’élevaient à 1 million de dollars par escale, auraient eu des conséquences catastrophiques pour les armateurs et les affréteurs, en particulier les petits exploitants des Grands Lacs et des côtes Est et Ouest, dont les navires accostent fréquemment dans des ports américains. Les frais auraient sans doute été transférés aux affréteurs ou aux propriétaires des marchandises et, en définitive, aux consommateurs. L’onde de choc créée se serait propagée dans toute la chaîne d’approvisionnement.
Toutefois, en réponse aux commentaires reçus de diverses parties prenantes, l'USTR a assoupli les mesures proposées. Gain majeur pour les armateurs canadiens : d’importantes exemptions visent les navires fréquentant le corridor commercial des Grands Lacs ou effectuant du transport maritime à courte distance, ainsi que les navires de petite taille.
Les frais portuaires sur les navires de construction chinoise
L’annexe II de l’avis de mesure établit des frais de service payables par les exploitants de navires construits en Chine qui accostent dans les ports américains. À l’arrivée du navire aux États-Unis, l’exploitant doit payer des frais correspondant à la plus élevée de deux sommes calculées selon le tonnage net ou le nombre de conteneurs déchargés dans le port. Les deux formules prévoient un délai de grâce s’étendant jusqu’au 14 octobre 2025, après quoi les frais augmenteront chaque année jusqu’en 2028. Les frais se présentent comme suit :
Date |
Frais par tonne nette (en dollars américains) |
Frais par conteneur déchargé (en dollars américains) |
17 avril 2025 |
0 $ |
0 $ |
14 octobre 2025 |
18 $ |
120 $ |
17 avril 2026 |
23 $ |
153 $ |
17 avril 2027 |
28 $ |
195 $ |
17 avril 2028 |
33 $ |
250 $ |
Pour les navires faisant escale dans plusieurs ports américains d’affilée, les frais ne seront appliqués qu’à la première escale d’une même suite. De plus, ils seront facturés un maximum de cinq fois par navire et par an.
Les exemptions
L’avis de mesure prévoit un certain nombre d’exemptions, dont des exemptions générales qui devraient faire pousser un soupir de soulagement à de nombreux armateurs canadiens.
D’abord, l’avis exclut les navires relativement petits d’une capacité maximale de 55 000 tonnes de port en lourd (« tpl ») ou d’une « capacité de transport en vrac individuelle » maximale de 80 000 tpl. Cela signifie vraisemblablement que les vraquiers d’une capacité de 80 000 tpl ou moins sont exemptés, tout comme les autres navires (par exemple, les pétroliers ou les navires de transport lourd) d’une capacité de 55 000 tpl ou moins. Cette exemption couvre la vaste majorité de la flotte canadienne de vraquiers.
Deuxièmement, les frais ne s’appliquent pas aux navires effectuant du transport maritime à courte distance, soit ceux qui accostent dans un port américain après un voyage de moins de 2 000 milles marins à partir d’un port étranger. Cette exemption s’appliquerait par exemple à un voyage direct de Montréal à New York ou de Vancouver à Los Angeles. En outre, comme les frais s’appliquent uniquement au premier port d’une série d’escales aux États-Unis, elle couvre la quasi-totalité du trafic côtier et des Grands Lacs entre le Canada et les États-Unis.
Troisièmement, les frais excluent les laquiers (Lakers Vessels), soit les navires qui fréquentent principalement le corridor commercial des Grands Lacs. Cette exemption semble redondante, compte tenu de celle qui vise les voyages de moins de 2 000 milles marins, mais elle marque l’intention de l’USTR de ne pas nuire au secteur du transport maritime des Grands Lacs.
Ces exemptions étendues et superposées devraient rassurer les armateurs canadiens, compte tenu des conséquences désastreuses que laissait entrevoir la première mouture des frais proposés.
Diverses autres exemptions sont prévues pour :
- les navires arrivant sur lest (vides), c’est-à-dire qu’ils ne font que charger des marchandises aux États-Unis pour l’exportation;
- les navires transporteurs de produits chimiques;
- les marchandises transportées pour le gouvernement américain;
- les navires de propriété américaine ou battant pavillon américain qui participent à divers programmes gouvernementaux de transport maritime;
- les navires de propriété américaine (l’entité américaine propriétaire du navire est contrôlée par des personnes américaines et est détenue à 75 % au moins par des personnes américaines).
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Bien que ces mesures précises épargnent en grande partie les armateurs canadiens, les décisions des États-Unis en matière de commerce restent changeantes et source d’instabilité. Les groupes du Commerce international et du Transport maritime de BLG continuent de suivre la situation de près. Pour toute question sur l’applicabilité de ces mesures ou d’autres mesures à vos navires, n’hésitez pas à contacter les juristes ci-dessous.